interview Manga

Atsushi Kaneko

©Casterman édition 2014

Atsushi Kaneko fait part des rares artistes japonais à plaire à un public non amateur de mangas. Et pour cause, avec un style très différent de ses compatriotes et plus proche d'un Charles Burns ou d'un Paul Pope, le mangaka a su s'imposer comme l'un des auteurs à suivre. Après Bambi et Soil, il est de retour en France avec un polar romantico-psychanalitique nommé Wet Moon. Devenu un habitué du festival d'Angoulême ces dernières années, nous avons recroisé la route d'Atsushi Kaneko qui a très gentiment accepté de nous parler de ses derniers travaux...

Réalisée en lien avec les albums Wet Moon T1, Soil T11, Soil T1
Lieu de l'interview : Festival d'Angoulême

interview menée
par
16 février 2014

Bonjour Atsushi Kaneko, peux-tu te représenter brièvement à nos lecteurs ?
Atsushi Kaneko : Bonjour, je m'appelle Atsushi Kaneko et je suis auteur de mangas. Mes séries ne ressemblent pas beaucoup aux mangas classiques et jusqu'ici j'ai eu la chance d'être publié en France à 3 reprises avec Bambi, Soil et aujourd'hui Wet Moon. Je suis très honoré que le public français puisse découvrir mon œuvre.

wet moon Comment décris-tu cette impression d'être différent des autres mangakas ?
Atsushi Kaneko : Tout d'abord et avant tout, Suehiro Maruo, qui est présent cette année à Angoulême, est la personne qui m'a le plus donné envie de devenir mangaka. S'il y a une personne au Japon qui dépasse tous les autres en terme d’originalité, c'est Maruo. J'ai eu plusieurs fois l'occasion de le rencontrer mais j'étais tellement ému et heureux que je n'ai pas pu de lui parler. Je suis très content que l'on soit tous les deux présents ici car on passe beaucoup de temps ensemble.

Finalement, il faut que tu viennes en France pour passer du temps avec Suehiro Maruo !
Atsushi Kaneko : Oui, c'est très étrange comme situation. Je savais que les ouvrages de Maruo sortaient en France et connaissaient un vrai succès, qu'il était très apprécié. Cela me rendait déjà très heureux en temps que fan, et en tant qu'auteur, cela me donne beaucoup d'espoir.

Il y a 2 ans, tu nous disais être un grand fan de Paul Pope. L'as-tu croisé dans les allées du festival ?
Atsushi Kaneko : Non malheureusement car tu viens juste de m'apprendre qu'il était là !

Tu es de retour en France avec Wet Moon, peux-tu nous présenter la série ?
Atsushi Kaneko : Wet Moon est une histoire qui se passe dans le Japon des années 60 et qui raconte la traque d'une femme recherchée pour meurtres par un jeune détective. C'est un titre qui mélange une histoire d'amour aux codes du film noir. Il y a à la fois une intrigue policière et une intrigue psychologique. Je pense que ce qui fait la singularité de Wet Moon dans mon œuvre, c'est que l'histoire est racontée du point de vue du détective, qui souffre énormément car lors de la poursuite de la jeune femme, il a reçu un éclat de métal qui est resté dans son crâne. Cela provoque des pertes de mémoire et modifie sa perception du temps. Plus l'histoire avance, plus il perd pied entre la réalité et le délire.

wet moon


Il y a une énorme influence du cinéma dans ton travail. Sur Wet Moon, j'ai clairement pensé à celle du cinéaste David Lynch...
Atsushi Kaneko : A chaque fois que je vois un film de David Lynch, je ressens énormément de choses, à tel point que j'ai l'impression que cela ouvre en moi de nouvelles portes. Peut être que Wet Moon est né de ce genre de choc.

Tes héros sont souvent meurtris, par exemple à cause de l'éclat de métal dans Wet Moon. A quoi cela te sert-il dans l'élaboration de tes histoires ?
Atsushi Kaneko : Pour moi, c'est très important car je pense que d'une part l'histoire est plus intéressante lorsque les personnages souffrent, et d'autre part cela me permet de montrer ce qu'ils ont eu, ce que cachent leur âme, leurs tourments...

Y a t-il un genre de récits dans lequel tu ne te sentirais pas à l'aise ?
Atsushi Kaneko : Pour être honnête, il y a beaucoup de genres qui ne m'intéressent pas du tout. Je ne choisis de raconter que ce que j'aime.

deathco Sur quoi travailles-tu en ce moment ?
Atsushi Kaneko : Je travaille sur une nouvelle série, Deathco. C'est un jeu de mot en anglais entre « death » et « disco ». C'est un monde où il y a beaucoup de tueurs à gages et ils passent beaucoup de temps à s'entretuer. Le ton est très différent de Wet Moon, plus léger et plus absurde.

Comment décrirais-tu ton style ?
Atsushi Kaneko : Ce qui fait la particularité de mon style pour un auteur japonais, c'est que je ne lis pas de manga et je n'ai pas pu être marqué par le travail des autres auteurs, en tout cas par leur style et leur dessin. J'ai été nourri par la musique rock et les illustrations.

Si tu avais le pouvoir cosmique de visiter le crâne d'un autre artiste pour en comprendre son génie ou son art, qui choisirais-tu ?
Atsushi Kaneko : Stanley Kubrick. J'aimerais comprendre comment il était capable de faire des choses si parfaites. Lorsque l'on regarde ses films, on a l'impression qu'il maîtrisait chaque détail mais aussi de savoir comme il parvenait à digérer la quantité d'informations qu'il voulait délivrer.

Merci Atsushi !

Retrouvez également notre première interview avec Atsushi Kaneko en cliquant ici !

Remerciements à Aurélien Estager pour sa traduction instantanée.

En bonus :


dédicace kaneko


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