parution 05 janvier 2012  éditeur XXI  Public adulte  Mots clés Autour du 9ème art

XXI T17

Enfants de Kinshasa (kiosque)

Kinshasa, en Afrique, est peuplé de shégués (enfants des rues) souvent accusés de sorcellerie. Pour guides, des églises de réveil d’inspiration évangélique qui pullulent et instrumentalisent la misère sociale. Un récit graphique de toute beauté.


 XXI T17 : Enfants de Kinshasa (0), bd chez XXI de Hippolyte
  • Notre note Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • Scénario Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

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    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • dessin Yellow Star Yellow Star Yellow Star Yellow Star

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    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

©XXI édition 2012

L'histoire :

A Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo, l’horizon est bouché. Depuis la chute du maréchal-président Mobutu, la situation du pays est resté stable : pauvre économiquement et fragile politiquement. Révélateurs de ce malaise social, les shégués sont de plus en plus nombreux dans les rues. La plupart, nés dans des familles pauvres, ont été abandonnés ou « perdus » après avoir été accusés de sorcellerie par leurs proches, et donc reniés : Abdul, Gefté, Jean-baptiste, Jérémy, Emmanuel ont connu ce sort et parfois pire, ils ont été torturés. Ils seraient aujourd’hui 20 000 à Kinshasa. Bienvenu travaille au centre Munziriwha, lieu d’accueil pour les enfants de la rue de 5 à 14 ans, où l’on vient chercher « attention et affection ». Le centre est plein à craquer. Possédés par la misère, les Congolais le sont aussi par les pasteurs des différentes églises de réveil évangéliste. Ainsi, le « Ministère de la foi abondante », « La Manne Cachée » n’hésitent pas à promettre prospérité, santé et bonheur à des populations désœuvrées, naïves et en panne d’espoir. Un pasteur a vu « des résurrections de morts, des paralytiques marcher » ! Même les riches sont touchés par le phénomène : ainsi une banquière qui gagnait 2500 dollars par moi a tout lâché pour se payer une formation de pasteur à 5000 dollars. Véritables marchands de sable ou plus prosaïquement escrocs, les leaders évangélistes instrumentalisent la peur de l’avenir et la souffrance des individus. Les sorciers sont partout, doubles fantomatiques des shégués qui, eux aussi, sont partout, tous révélateurs de la misère du pays. Et l’artiste Tsimba de conclure : « Pasteur, c’est sans doute le job le plus rentable en ce moment au Congo ». Des dessins et des mots pour témoigner, des photos pour voir, un reportage pour comprendre…

Ce qu'on en pense sur la planète BD :

Non seulement la revue XXI a remis au goût du jour le reportage au long cours avec succès, mais en plus la BD y occupe une place de choix. 30 pages lui sont ainsi consacrées chaque trimestre : on y découvre des auteurs avec une sensibilité propre, des pays et des situations sociales étonnantes. Après avoir participé au festival BD organisé par le scénariste Apollo, Hippolyte décide de parler de la République Démocratique du Congo, pays ruiné, en proie à la misère sociale et privé de toute perspective. En se penchant sur le phénomène des « shégués », il évoque le malaise d'un pays incapable d’assurer un avenir à sa jeunesse. Pour seules bouées de sauvetage, les églises de réveil, multinationales de la foi ou entreprises florissantes qui capitalisent sur la misère des masses. Et Freddy Tsimba, artiste africain de renom, de dire que « les pasteurs vendent du rêve, de l’espoir, comme les gens n’ont plus rien, ils sont prêts à croire tout » ! A la manière d’Emmanuel Guibert dans Le Photographe, Hippolyte associe magnifiques photos en noir et blanc et dessins à l’aquarelle, auxquels viennent se greffer textes en voix-off, dialogues ou interviews, avec le ton du documentaire journalistique. Des scènes courtes, simples et efficaces et une galerie de personnages attachants. L'auteur, avec subtilité, pose aussi un regard délicat et humain sur des réalités dures, en s’interdisant d'ailleurs tout jugement. Juste la radiographie d’un pays pauvre, privé d’espoir et d’enchantement, failles dans lesquelles se sont engouffrés les diseurs de bonne aventure. Saisissant, juste et remarquable. Un des plus beaux reportages publiés par la revue XXI. Une petite suggestion à l’éditeur : finalement, pourquoi ne pas faire Des Enfants de Kinshasa un vrai one-shot, avec 40 pages de plus ? Il y a en tout cas tous les ingrédients pour. Une franche réussite.

voir la fiche officielle ISBN 9782356380432