L'histoire :
Erik Schultz a un talent rare : il a une ouïe surdéveloppée et travaille donc dans les U-Boots, au poste des écoutes sonar. En pleine guerre mondiale, la vie dans le sous-marin est pleine de dangers. Alors que l’équipage a réussi à attaquer un navire américain, les Allemands sont pris en chasse par un destroyer. Impossible, donc, de faire surface : les soldats doivent remettre leur vie entre les mains d’Erik et de ses capacités d’écoute. Pourtant, beaucoup sont inquiets, car ils n’ont pas confiance en cet homme étrange. Erik semble en effet souffrir de « Blechkoller », le syndrome de la boîte de sardine. Erik souffre d’isolement, de claustrophobie. Il est régulièrement assailli par des cauchemars venant de son enfance. Finalement, les Allemands décident de refaire surface pour prendre de l’air. Malheureusement, un sous-marin anglais les attend et ce dernier coule rapidement le U-966. Erik et le capitaine s’en sortent vivants, à la nage, mais ils sont repêchés par les Britanniques. Prisonniers de l’ennemi, ils vont vivre un véritable enfer…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après Zigeuner – l’histoire d’un boxeur tzigane qui connaît le succès en même temps que le nazisme – les éditions 12 Bis publient un autre album sur la seconde guerre mondiale, toujours vue côté allemand. Les célèbres U-Boots ont mené une véritable guerre des mers et coulé bon nombre de navires britanniques et américains. En contrepied, le scénariste espagnol Damian (Hernandez) montre l’échec et le destin tragique d’Erik Schultz, prisonnier dans une grande boîte de sardine métallique et condamné à supporter les fantômes de son passé. C’est d’ailleurs l’aspect le plus original du récit : les auteurs s’appliquent à montrer l’enfermement et le sentiment d’isolement et le lecteur se sent lui aussi piégé, asphyxié par ce terrible huis clos. Le fantastique se mêle à l’historique et il n’est pas rare qu’Erik entende des voix et soit entouré de fantômes. Le scénariste est habile et laisse toujours la porte ouverte : les visions de l’Allemand sont-elles réelles ou issues de sa folie ? En mêlant passé traumatisant et enfer de la guerre, l’histoire se concentre essentiellement sur cette fameuse « Blechkoller ». Avec un dessin caricatural et des couleurs agressives, le dessinateur Javier Hernandez (le frère du Scénariste) accompagne bien l’univers sombre de Damian. Entre la perversion des Anglais, la brutalité d’un père, la solitude et l’isolement, Erik se trouve dans une terrible impasse. Entre récit intimiste et récit historique, l’histoire bascule parfois dans le fantastique… le tout pour renforcer l’impression de piège mortel que vit Erik et qui le plongera ( !) dans la folie. Le pessimisme sur la nature humaine rappelle un autre auteur, Dimitri, qui avait écrit Kaleunt, autre témoignage passionnant et sombre sur les U-Boots. Pris entre deux eaux, le lecteur n’est pas prêt de voir la lumière dans cet album dur et saisissant. Le prix VSD a fait de cette bande dessinée son coup de cœur, décerné par le président du jury, Antoine de Caunes.