L'histoire :
1945, Algérie. L’insurrection de Sétif est durement réprimée par l’armée française. Le bilan est lourd : une centaine de morts du coté des colons européens pour prés de 10 000 « natifs », sans compter les victimes des nombreux viols et agressions perpétrés à l’occasion. C’est dans ce contexte particulier, que Raoul, l’ainé des enfants Zagur, une famille juive qui n’est ni à sa place parmi les colons, ni parmi la communauté algérienne, décide de tenter sa chance à Paris. L’aventure tourne au drame puisqu’en 1950, il est abattu de plusieurs coups de feu rue Saint Denis. Raoul aurait en effet mis de trop près son nez dans les affaires d’un mac peu conciliant. Ses quatre frères cadets, restés en Algérie, font leur vie doucettement : on les connait surtout pour leur facilité à donner du poing pour se faire respecter. En 1955, c’est autour d’Antoine de gagner la capitale, avec le secret espoir de réussir son job de représentant de commerce pour faire venir les siens. Et de fait, en 1956, la famille Zagur au complet s’installe rue Mention, prés du Faubourg Montmartre. Antoine monte une petite escroquerie, qui lui permet de faire vivre ses frères. Il s’attire ainsi les bonnes grâces de clan Haslan, qui règne sur le quartier. Aussi, en 1957, les 4 frères intègrent-ils « la famille », avec pour principale activité l’encaissement des « loyers » des commerçants. En parallèle, l’escroquerie en vente de vin tient bien la route et les petites activités de proxénétisme commencent à rapporter. Et puis, la vitesse supérieure est enclenchée, lorsque le père Haslan demande aux Zagur, pour voir ce qu’ils ont dans le ventre, de descendre un yougo embarrassant…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Librement inspirée de l’histoire des frères Zemour (surnommés, évidemment, « Les Z »), figures du grand banditisme français dans les années 1970, la série mise en place par Richard Malka et son compère Frédéric Volante, s’inscrit parfaitement dans la tradition des sagas mafieuses popularisées par le cinéma : violente et baignée par cet esprit clanique si particulier qui, sous prétexte d’honneur ou de protection de la « famille », permet les pires exactions. Le scénario offre à cette première partie l’ascension fulgurante des 4 Zagur dans le « milieu » : départ de Sétif où ils n’ont pas leur place ; débarquement à Paris (avec un désir de revanche et de vengeance) ; petites magouilles et escroqueries ; intégration au clan qui contrôle Montmartre ; coups d’éclats ; arrivée au sommet… L’ensemble se déroule sur plus de 20 ans (1945/1966) séquencés par des tranches de vie chargées de baliser ce parcours sans concession. Ce découpage, s’il confirme l’approche hyper réaliste de la narration (entre docu-historique à la manière de Mafia Story et fiction pêchue), hache particulièrement la lecture. Ça va vite. Trop vite, dans le temps, si bien qu’on a du mal à s’attacher aux 4 frangins (pourtant aux reliefs psychologiques à fort potentiel) : aucun ne s’habille pour l’instant du charisme adéquat et nécessaire pour nous lier totalement au récit. Du coup, l’ensemble se laisse lire agréablement, mais ne surprend jamais. Seuls, alors, les 2 flashforwards nous conviant à Miami en 1983, piquent un peu notre intérêt. Graphiquement, Frédéric Volante s’inscrit parfaitement dans la démarche réaliste du propos, offrant un dessin détaillé et gratifié de jolis mouvements de caméras. Une première étape, peut-être, un peu pâlichonne, mais nous laissant tout de même l’envie de nous attarder sur ces destinées hors du commun.