L'histoire :
Dans une région en proie à la crise industrielle, vit Jennifer, une jeune femme belle et séduisante, tout à fait consciente de sa beauté. « Un casting extraordinaire pour le clip du prochain single du célèbre Mc Ragga » est organisé dans la région, afin de recruter des danseuses et les exhiber à la face du monde. Au même moment, des licenciements massifs sont annoncés à Exilor, l’usine d’à côté. Dans ce monde sans perspectives, la seule issue pour Jennifer semble être de faire carrière dans le show-biz, le strass et les paillettes. Malheureusement, l’ascenseur social est en panne et les rêves de gloire de Jennifer vont peu à peu s’évanouir dans une réalité bien trop cruelle et violente…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’ACCFA est une association qui souhaite notamment promouvoir la chanson francophone. Dans ce but, elle a créé une collection, Zik&Bulles, dont l’ambition est d’associer musique et BD, tout en réunissant des artistes ou auteurs partageant une vision commune du monde. David Benito et Laurent Bourlaud ont donc eu pour objectif de mettre en images une chanson du nouveau CD du groupe de rock Les Hurlements d’Léo, désormais installé depuis un bon bout de temps dans le paysage musical français. Le groupe et les auteurs partagent d’ailleurs une vision du monde ancrée bien à gauche. Au menu, le capitalisme et ses conséquences : « domination, humiliation et argent ». Une cause : l’ennui existentiel. Une seule réaction possible : la résistance. Critique acerbe de la société du spectacle et de la mondialisation, condamnées à créer du vide et de l’inutile, le récit est sans ambiguïté. C’est l’occasion de dénoncer les illusions enfantées par la société de consommation et le capitalisme sauvage, coupables de mettre au chômage des régions entières et de fabriquer un désespoir insondable, créant ainsi un ironique Bordel de luxe… Rêves de gloire qui deviennent cauchemars d’un soir, l’histoire ne peut que s’achever dans une violence noire et désespérée. Dans cette chronique sociale douloureuse et grinçante, la narration directe et la colorisation très flashy-pop traduisent bien la superficialité et la violence des rapports sociaux, malgré une lecture vite terminée. Le parallèle entre taylorisme, division du travail et décomposition des corps est aussi bien vu, même si le propos verse parfois dans le manichéisme (les méchants patrons vs les pauvres petits employés) et le caricatural (rappeurs, tuners, sexe, drogue, alcool). Néanmoins, pour son message politique porteur d’une utopie, la BD vaut assurément le détour. Ou quand imager la musique et chanter la BD se révèle une bonne idée ! (CD et BD sont vendus ensemble).