L'histoire :
Un observateur décrit les gens dans la rue, qui avancent tels des zombies en période de pandémie virale. Les mines sont tristes, on les sent accablés, déshumanisés, vidés de leurs substances. « Mort ou vivant, rien n’a changé. Ils sont le passé, font s’emblant d’exister, et le futur a disparu depuis l’arrivée de ce virus. » Ils ne prévoient rien, sauf « Qu’est-ce que je vais manger ? » Les tâches quotidiennes remplissent tout leur espace de pensées. Pire : ils ne s’intéressent pas les uns aux autres, ils font comme si leur propre individualité était seule à avancer. Et les rares fois où une « interpolation » a lieu, ils s’aboient dessus. Aussi, il n’est pas utile d’aller à leur rencontre. Et les rares fois où cela est nécessaire, il est conseillé de porter des vêtements de rigueur, ne serait-ce que pour se fondre dans la masse. « La politesse et la bienveillance sont des masques que les gens ne remarquent plus. »
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les amateurs de zombies façon Romero ou Walking dead risquent fort d‘être déçus par les promesses narratives intrinsèques au titre. Et pourtant, Zariel est bien dans la thématique du mort-vivant, en décrivant notre société individualiste et désenchantée telle une civilisation zombiesque. C’est en tout cas le propos de la face recto d’une looooongue bande dessinée au sens strict, qui mesure une bande de 2,79m de long. Repliée en accordéon tous les 9 cm, cela forme ce qu’on appelle un leporello, un exercice de graphiste sympathique mais… un peu chiant à lire pour les destinataires. Et forcément, après avoir parcouru ce long recto empreint de misanthropie et d’une population urbaine et terne, on espère basculer sur un verso qui chante un peu plus ! Au risque de spoiler totalement (les curieux peuvent s’arrêter de nous lire ici), ce verso – forcément de 2,79m lui aussi – fait plus honneur au titre. Le parallèle entre notre société individualiste est en effet fait avec une vraie population de vrais zombies, au sens gore et affamé du terme. Ouf. Si l’exercice est rempli, notamment parce que Zariel sait dessiner avec une griffe semi-réaliste charbonneuse et goth’ à souhait, on ne va pas s’extasier non plus sur le caractère convenu du propos. Oui, par moment, au sein d’une grande agglomération urbaine, surtout par temps de covid, on a l’impression que les gens sont comme des zombies… Bon, ok. Mais quelle transcription pessimiste et punk de notre époque ! L’enfer de Dante est proche… Revenez en campagne, amis des villes : nous n’avons pas moins le covid, mais il semble que nous ayons conservé le sens de la solidarité et de la bienveillance. Les zombies des champs sont forcément plus gentils.