L'histoire :
Quelque part perdu dans les marais, un homme pêche. Il sépare les bons des mauvais poissons, remets les premiers à l’eau et garde les seconds dans une nasse. Il remercie en psalmodiant d’étranges paroles un certain Roi des poissons et un autre qu’il appelle l’Apôtre. Alors qu’il s’apprête à partir, une jeune femme sortie de nulle part vient le trouver. Elle cherche le Passeur capable de la mener dans l’île des pendus. L’homme l’invite à le suivre. Leur barque croise en chemin une noyée aux traits encore préservés. De fait, mi-humaine mi-serpent, la créature est restée prisonnière des marais, condamnée à y errer pour l’éternité. Aux abords de l’île, le spectacle de désolation atteint son comble. De nombreux restes de corps écharpés et pendus semblent mettre en garde le visiteur imprudent. Mais la jeune femme a quelque chose à proposer. Au chef de la confrérie qui règne sur l’île, elle se dit protégée par Sarmuna-la-Louve et promet de l’or, beaucoup d’or. Pour l’obtenir, il faudra que ces brigands et parias se décident à la suivre dans sa croisade, contre son oncle Volas. Après avoir tué le seigneur de la cité des chiens, il a pris sa place. Guidé par l’Ombre, il s’est débarrassé de son épouse Wodia, après qu’elle lui ait donné un fils capable de lui succéder. Tout comme ses crimes, son pouvoir n’a dès lors cessé de croître. Mais l’heure est aujourd’hui venue pour lui de payer…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pour qui s’est par avance promené sur les blogs de Yohan Radomski et Jakub Rebelka, ce premier tome de La Cité des chiens est sans doute plus une confirmation qu’une surprise. Les planches et spoilers entraperçus laissaient entrevoir un travail de qualité tant les rendus N/B puis couleurs paraissaient soignés, pleins de promesses. Mais une inconnue demeurait : l’histoire. Qu’allait donc raconter cette série à l’esthétique aguicheuse, mais au titre à a fois onirique et violent ? Au début, on doit avouer ne pas trop savoir où on met les pieds. On entre dans cette lecture comme son héroïne dans le marais : doucement et sur ses gardes. On comprend que le monde médiéval dépeint ne sera pas historique, mais qu’en revanche il tiendra beaucoup du conte, voire de la fable macabre. Que derrière des abords charmeurs, le regard posé par les auteurs est sans pitié pour la condition humaine, sans état d’âme ! Récit adulte poétique et cru, La Cité des chiens brosse en effet le tableau d’un univers complexe où la vengeance paraît être la vertu cardinale. Les relations humaines y sont malsaines et les principaux caractères, vils. Bref, il est fait peu de cas de la vie humaine qui ne tient qu’à un fil. Il n’est pas aisé de distinguer d’emblée qui est qui et on confond parfois les personnages entre eux. Pourtant, au fur et à mesure que l’on progresse, le titre nous happe sans cesse un peu plus. Si bien que la chute nous prend de court. Il faut lire jusqu’à l’ultime lettre pour tout comprendre. Que nous réserve à suivre ce monde perdu ? Une lueur d’espoir ? Qu’importe, au final, car à l’instar d’une ambiance graphique sombre mais séduisante, cette histoire de pseudo-chiens, pendus, cerfs ou autres oiseaux, nous a suffisamment plu pour y replonger sans question…