L'histoire :
C’est un vieux projet qui se concrétise, venant d’un atelier bruxellois de création graphique. Il s’agit, une fois par semaine, d’envoyer une carte postale à son éditeur, peu importe le jour, seul le cachet de la poste fait foi. Recto et verso forment au moins deux cases. Toutes les cases mises bout à bout formeront une enquête policière, où les indices sont les détails insignifiants de la vie quotidienne de l’auteur. Un cœur taillé dans un tronc ? Un cœur qui pleure ? Un cœur poussé par la puissance de l’amour ? Une maison faite de scotch de protection… l’enquête commence. Sur la deuxième carte postale, le collage n’a pas tenu. C’était un avion sur ciel gris, avec des nuages blancs. De l’autre côté, le dessin d’une souche sculptée représente un visage biscornu. Des nouvelles de la maison : un sac de gravats a tout fait basculer. En jetant le sac de gravats qui trainait dans une chambre de la colocation, il ne se doutait pas que c’était la matière première d’une œuvre d’art en devenir. Grave erreur ! Il est mis dehors. Attention ! Sac de gravats, ballons dégonflés : chaque détail compte et peut être une œuvre d’art… La déprime s’installe dans l’enquête, les indices parlent d’eux-mêmes.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Sur une idée d’un de ses amis bruxellois, Baladi (Renégat…) se lance un défi : réaliser en cartes postales un album d’au moins 104 planches sur un an (2 fois 52 semaines). Prenant pour prétexte une enquête policière, cette réalisation est en réalité un journal intime. Malmené dans sa vie sentimentale et par ce monde en permanent conflits, il expulse son incompréhension de ce qui l’entoure et sa souffrance face à un fonctionnement qui lui échappe, que ce soit en micro ou en macrocosme. Tout ça a, comme souvent, une cause sentimentale, déclencheuse d’acte créateur, en réponse à ce qui a été détruit. L’expression graphique de ce réflexe créatif est un peu disparate. Difficile, en effet, de trouver un autre fil conducteur que le temps qui passe, avec des évènements marquants pris à la volée, à considérer comme des indices. Indices certes, mais pas d’une enquête policière, plutôt d’une profonde dépression dont on accompagne le déroulé. Brrr… ça glace l’optimisme, en même temps que ça renvoie à des états d’âmes courants à propos de notre environnement global, définitivement agressif, qui cultive sentiment d’urgence et de danger. Des collages, de l’encrage, du crayon, du feutre… autant de supports pour mettre en avant une détresse courante de nos jours, comme en témoignent les rencontres de Baladi au fil des jours. Difficile de se tourner vers l’avenir quand le passé alourdi tellement le présent. Tiré à 500 exemplaires avec en prime une carte postale signée par l’auteur, cet exercice de style est à envisager comme un carnet à la Sfar ou Trondheim, version expérimentale.