L'histoire :
La vie a repris son cours sur l'Île Bretonne. Tout semble avoir repris comme avant. Et pourtant, pour les femmes, rien ne sera plus jamais pareil. Les hommes qui ont eu la chance de rentrer et de retrouver leurs épouses les trouvent différentes. Les tensions commencent à peser sur l’île. En 4 ans, ces dernières se sont émancipées et ont appris à se débrouiller seules... ou presque. On dirait même que toutes ne sont pas contentes de revoir leur mari. Qu'à cela ne tienne, elles savent faire semblant ! La guerre et l’absence d’hommes les ont rendues rebelles et féministes. Les femmes de l’archipel ont ainsi pris goût à la liberté. Elles forment une sorte de confrérie avec un pacte qui les lient toutes... un lourd secret. Le facteur Maël n’est plus là, mais il est dans tous les esprits. Il est mort en les laissant toutes nostalgiques et peut-être un peu honteuse d’avoir eu un amant hors norme, qui leur a fait découvrir les plaisirs de la chair. Cependant, entre la parole de l’une qui ne supporte plus le mensonge, les maladresses d’une autre et les sous-entendus, elles vont éveiller curiosités puis soupçons. Certaines disparaissent... Meurtres, suicides ? Il faut agir au nom de leur honneur. Mais le nouveau curé fouine, après en avoir entendu certaines en confessions. Les mystères et les regards fuyants le rendent méfiant. Il enquête, accompagné du maire, photographe amateur, qui, à l’époque, aurait été témoin de scènes compromettantes avec clichés à l’appui. Le complot pourrait être révélé. La menace et les mensonges pèsent lourd sur les consciences. De Maël, il ne reste qu’un pied-bot qui, enfant, faisait de lui la risée de ses camarades. Pour elles toutes les souvenirs se résument à son vélo mais surtout le secret inavouable de sa disparition, peu avant la fin de la guerre...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le premier album était prévu en one shot. Etant donné le succès et le potentiel narratif, le scénariste Didier Quella-Guyot présente finalement une suite à cette aventure bretonne. Car une question piquante restait en suspens : qu'allaient devenir toutes ces femmes au retour des messieurs ? Quella-Guyot est accompagné d’un nouveau dessinateur, avec lequel il collabore pour la seconde fois : Manu Cassier. Or lui-même est ancien facteur... ça colle au sujet, non ? Mais surtout un dessinateur confirmé. En fin d'ouvrage, le lecteur peut découvrir un carnet de recherches graphiques. Il est toujours intéressant de découvrir les idées et évolutions graphiques qui conduisent au dessin final. Le scénario est bien ficelé, avec toujours des rebondissements et révélations inattendus... Des bateaux qui sombre bizarrement en mer... Une femme qui saute lorsqu'une autre tombe... Et quid de ce prêtre qui s'improvise détective après la découverte d'éléments troublants... Manu Cassier utilise un style graphique sobre et sombre, à l'image de l'atmosphère pesante qui règne depuis la fin de la guerre. L'auteur fait un retour dans le passé avec Linette qui, en 1958, revient sur son Île natale. Après avoir appris l’identité de son père, et avoir pu mettre un visage sur une photo (celle de l’ancien facteur !) elle voudrait comprendre ce qu’il s’est passé et percer le secret de la mort de Maël. Le souvenir de ce dernier reste vif dans la mémoire de toutes ces femmes. Le cliché des fausses-veuves-éplorées est le point de départ de toutes les interrogations. Comme pour le premier tome, on referme cet album avec le sourire, en pensant à ce facteur privilégié et sûrement un brin revanchard. Et surtout aux mystères persistants que sa mort suscite. Un classique piquant du conte breton : la vie sur un bout de terre isolée, avec ses légendes, ses traditions, qui vire au polar !
