L'histoire :
A Manhattan, de nos jours, Molloy, un jeune homme de 18 ans au physique ingrat, fait son premier jour en tant que chauffeur de taxi. Toute sa vie, il a attendu ce moment où il pourrait accomplir son rêve : conduire un de ces fameux yellow cab, certes pas vraiment de première main, mais un yellow cab quand même ! Pour être sûr de bien commencer, Molloy s’est garé en face de la Eastern Union Bank, à 17h15, heure à laquelle les 2564 employés vont inévitablement se déverser dans la rue. Soudain, une élégante blonde apparaît dans son rétroviseur et monte à l’arrière. Molloy avait déjà vu des filles avant, à la campagne notamment, mais des comme ça, jamais ! Il se met à fantasmer sans trop oser initier une conversation… Il repense à son milieu d’origine, de la chance qu’il a eu, enfant, d’être sorti de l’orphelinat par sa richissime grand-mère, à la mort de son chien. Tout en roulant, il ne peut s’empêcher de résumer sa vie, en grandes lignes, à sa passagère… ébahie, sur la banquette-arrière. Une fois arrêté à destination, il a une idée : il lui offre la course ! Elle est son tout premier client, ça va lui porter bonheur. Pour le remercier, la jeune femme lui donne un baiser sur la joue. Molloy est aux anges…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Malgré son air enjoué, Taxi Molloy est un curieux one-shot introspectif, d’une « glauquitude » totale. Le ton est rapidement donné : nous allons voyager en taxi à travers New-York, tout au long de l’album, aux côtés de ce nigaud de Molloy, mais surtout à travers ses pensées et ses souvenirs. Petit à petit, on découvre sa situation familiale, son ravissement intérieur d’une niaiserie sans fond, une forme de candeur abrutie, mais foncièrement satisfaite. « Heureux les simples d’esprits », qu’il disait l’autre... Ce ton introspectif nous enfonce progressivement un peu plus bas à chaque planche dans le sordide. On découvre son enfance, son ignoble grand-mère, responsable de bien des maux (mais pas seulement)… et on se met à craindre le pire concernant les clientes systématiquement sexys qu’il monte dans son taxi. A moins que François Dimberton, au scénario nous refasse le coup du syndrome Forrest Gump ? Pas vraiment, vu le final inattendu et… paroxystique dans ses aspects pitoyables. Le dessin réaliste signé Alexis Chabert colle à l’ambiance de ce récit original. Sans fioriture spectaculaire, il en rajoute tantôt encore une couche, à l’aide de macro-plans immondes (quand Molloy bouffe la mouche, ou la face haineuse de cette sal… de grand-mère). Répugnant, brrrr…