L'histoire :
Un soir de février 2021, Shaghayegh, originaire d’Iran, et montréalaise d‘adoption, se voit soudain sommée d’évacuer l’appartement qu’elle partage avec son compatriote colocataire Ben, aux côtés de tous les occupants de l’immeuble, pour d’obscures raisons de sécurité. La voilà relogée dans un hôtel, alors que la pandémie mondiale apporte déjà son lot de contraintes et d’inquiétudes. Pour la jeune femme qui avait débuté la reconstruction de sa vie après avoir fui son pays, commence alors une période d’instabilité mettant à mal son moral et ses projets artistiques de dessinatrice. C’est aussi un temps d’introspection...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Débutant sur l'événement dramatique de l'évacuation de son immeuble, l'histoire de l'autrice diffuse dans les marges grâce à des flashbacks plutôt heureux contant son enfance iranienne. Et même si elle a fui l'intégrisme de son pays natal et ne souhaitait tout d'abord plus avoir de lien avec celui-ci, elle finit par comprendre que les racines ne se coupent jamais. Les coquelicots, dès lors, représentent ce qu'il reste de plus fort à ses yeux, en dehors des pâtisseries Rangarang qu'elle retrouve dans l'épicerie iranienne l'embauchant, faute de mieux. Shayhayegh Moazzami, jeune femme ayant la tête sur les épaules, élevée dans une famille progressiste, parvient à nous faire sentir avec une sensibilité palpable ce qui fait le choix d'une citoyenneté. Sans rien renier de sa religion et de sa culture, elle embrasse la vie canadienne avec envie et se plie avec sérieux et grâce à l'examen de passage nécessaire, dans un grand respect de son nouvel environnement. En cela, ce récit bien écrit et mis en page, aidé d'un dessin aux lavis de gris, simple, souple, onctueux mais sans esbroufe, déjà vu dans Hanté paru en 2021, accompagne avec talent un message d'intégration réussi. Il faut voir comment tout s'acharne pourtant dans cet immeuble à la décourager. Un exemple de bel ouvrage, juste et moderne, où le social rayonne.
