L'histoire :
Depuis la fin de la Première Guerre mondiale, l'Empire Ottoman est placé sous la tutelle des pays « vainqueurs » : Angleterre, France et Grèce se partagent le territoire. Mais Mustapha Kemal dit Atatürk entre alors en résistance pour reconquérir ces terres et mettre la Turquie sur la voie de la modernisation, au prix de combats douloureux et de souffrances terribles. Manolis, jeune grec qui habite avec sa famille en Asie Mineure dans la région de Smyrne, sur la côte ouste de la Turquie, va devoir affronter les conséquences du conflit gréco-turc. A l'automne 1922, les troupes turques mettent à mal l'armée grecque. Les conséquences humaines sont terribles : Manolis et ses proches, expulsés, doivent quitter leur village pour rejoindre leur mère patrie, la Grèce « européenne », et grossir les rangs des quelques 1,5 millions de réfugiés. Sur le front, les massacres des populations d'Anatolie sont légion. La famille de Manolis se trouve alors disloquée aux quatre coins du pays tandis que le père du garçon, resté sur le front pour se battre, est introuvable... Sans oublier les conditions de vie difficiles une fois arrivé en « Grèce », les villes n'étant pas prêtes à accueillir un flux de réfugiés aussi dense...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Manolis est l'adaptation BD issue du roman éponyme d'Allain Glykos publié en 2005. Le livre évoque l'apprentissage du jeune Manolis (père de Glykos), grec habitant à Vourla en Asie Mineure (actuelle Turquie) avant que les troupes de Mustapha Kemal ne s'en emparent et chassent les Grecs en Europe. Automne 1922, lors de la « Grande Catastrophe », les armées grecques sont défaites par les Turcs. Débute alors un long périple pour Manolis, obligé de fuir et ballotté entre Athènes, Nauplie, Héraklion et la Crète. Si le témoignage n'est pas inintéressant, il peine néanmoins à décoller, faute d'une mise en perspective historique plus précise. Pas sûr que le non spécialiste y voit clair sans connaître précisément les faits, lieux et enjeux du conflit gréco-turc de 1922-23, forcément complexes (mise sous tutelle de l'Empire ottoman, massacres, résistance, nationalisme, déplacement de population...) et les repères chronologiques essentiels, seulement rappelés par quelques annexes, pour un ensemble flou. L'itinéraire et le témoignage familial de Manolis,garçon qui délaissera sa naïveté au profit d'une éthique de l'action, sont quant à eux trop classiques en termes d'expression des sentiments, en plus d'être rarement aidés par une écriture convenue. Du coup, on s'attache peu au jeune garçon, tout en étant davantage sensible à la trame de fond historique, mais traitée ici hélas de façon superficielle, le récit se concentrant sur la personnalité sans relief de Manolis. Graphiquement, le trait d'Antonin séduit, habile pour retranscrire la sécheresse des paysages méditerranéens ou la violence des combats, sans en faire trop. Mais au final, un récit bancal et inégal qui, malgré un sujet historique intéressant sur le papier, passe à côté de son sujet faute d'avoir mieux précisé le contexte.