L'histoire :
Le 12 janvier 2010, l’humanité se réveillait meurtrie, secouée par l’énième tragédie qui s’abattait sur Haïti : un tremblement de terre sans précédent venait de ravager la capitale Port-au-Prince, causant plus de 200 000 morts et bien plus encore de blessés. Déjà exsangue, après des années de dictature, le pays le plus miséreux de l’hémisphère nord plongeait un peu plus dans la détresse. L’élan de compassion mondial déclencha une forte aide internationale et la mobilisation de nombreux artistes : les premiers pour une chanson, les seconds pour des dessins. Humaniste parmi d’autres, Jean Plantu (qui illustre la Une du Monde depuis des années) a créé en mai 2008 l’initiative « Cartoonist for Peace », exhortant le respect et la compréhension pluriculturelle, en s’appuyant sur le dessin de presse en tant que langage universel. Voici donc l’ouvrage qui concrétise ce soutien, car un sticker le précise en couverture : « en achetant ce livre, vous aiderez les victimes du séisme » ; la vente de cet album se fait effectivement au profit de la Fondation de France. Il s’agit donc d’un recueil de dessins, réalisés pour l’occasion par un casting international : des habitués de l’exercice de presse (Chappatte, Plantu, Danziger, Tignous, Schwartz, Jiho, Chaunu, Dilem…) ou d’auteurs de BD de renom (Mo/CDM, Edika, Lindingre, Thiriet, De Metter, Loustal, Masson, Argunas, Ferrandez, Chauzy, Catel, Peyraud, Coutelis, Comès, Truong… ou Jacamon pour la couverture).
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’aide financière apportée à la Fondation de France, par les ventes de ce recueil de dessins de presse, peut certes paraître décalée au regard de l’urgence des besoins… mais les contraintes éditoriales sont pour la plupart incompressibles. En outre, quand bien même les médias ont vaqués vers d’autres contrés, la situation sanitaire en Haïti est toujours alarmante. Louons donc l’initiative louable de Plantu et son association Cartoonist for Peace et incitons alentours à l’achat. D’ordinaire, le dessin de presse tend vers l’humour… Cynique, absurde ou parodique, il s’avère souvent le meilleur véhicule de bien des propos. Ici, au regard de l’ampleur de la tragédie, de nombreux artistes ont livré un dessin symbolique, avec beaucoup de pudeur, voire de poésie. Certains caricaturistes parviennent tout de même à tirer leur épingle du jeu et on ne saurait les en blâmer. Chacun y va ainsi de sa fibre, pour constituer au final un recueil agréablement éclectique dans les styles graphique et dans les tons. Un fil conducteur vise toutefois à annihiler l’idée largement relayée, que l’île serait « maudite » (ça ne veut tout bonnement rien dire). Néanmoins, paradoxalement, le dessin qui revient le plus sous les crayons des différents intervenants est celui de la poupée vaudou martyrisée… Comme quoi, en dépit des bonnes intentions, les réflexes inconscients populaires sont tenaces !