L'histoire :
En 1941, le monde est en guerre, sauf en Argentine dans la paisible province de Cordoba. Les Allemands se sont pourtant installés dans leur colonie et beaucoup de grands personnages influents du Reich vivent dans le luxueux Eden Hôtel. C’est ici que la famille Guevara emmène leur fils Ernesto pour une cure de santé. En effet, le petit souffre de crises d’asthme régulières. L’enfant est d’un caractère ombrageux et rebelle à toute autorité. Sa préceptrice est une jeune Allemande, nouvelle dans l’établissement, Helena Werner. Elle va avoir beaucoup de mal à calmer les humeurs du jeune Ernesto. Les parents remarquent tout de même que la jeune femme est douée pour s’occuper des enfants. La directrice de l’hôtel, Frau Ida, une vieille acariâtre, dévouée corps et âme à la cause d’Hitler, dirige l’établissement avec un zèle marqué. L’hôtel a installé des hauts-parleurs dans la cour, qui diffusent régulièrement les discours politiques du Führer. Le père d’Ernesto, Ernesto Guevara Lynch, refuse cet endoctrinement et enlève son enfant de l’hôtel. Ernesto fils grandit et écrit régulièrement à Helena. Dans le même temps, son père rentre dans le mouvement anti-nazi de la région : l’Accion Argentina. Il décide de retourner à l’Eden Hôtel avec son fils, pour espionner les agissements des Allemands…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Tout a été écrit sur Ernesto Che Guevara (c’est un thème à la mode en bande dessinée), quoique peu a été fait sur son enfance. Les auteurs argentins Diego Agrimbau et Gabriel Ippoliti (qui ont déjà collaboré sur deux one-shots précédents) imaginent ici l’adolescence du Che à travers le contexte particulier de la seconde guerre mondiale. Ils rétablissent une vérité méconnue : l’Argentine a vécu l’occupation allemande et l’influence fasciste sur ses propres terres. Le point de départ idéal, donc, pour imaginer un nouveau combat de Guevara : la lutte contre le nazisme ! Cet épisode est certes imaginaire, mais comme l’indique Agrimbau dans ses annexes, le père Ernesto Guevara Lynch s’est bien engagé dans un mouvement anti-fasciste et il a mené quelques missions d’exploration et d’espionnage pour déterminer les projets de l’armée allemande sur le territoire argentin. On peut donc logiquement imaginer que cette forme de résistance a profondément influencé le jeune Ernesto. Dans un mélange de réalité historique et de fiction, Agrimbau franchit allègrement le pas : Ernesto a non seulement vu son père lutter contre le nazisme, mais il y a aussi activement participé. Dans une aventure rocambolesque et pleine d’aventures, le jeune Guevara fait donc ses premières armes en affrontant la machinerie nazie et tout ce qui l’accompagne : les marâtres dévouées à Hitler, les marchands d’armes véreux et corrompus, la propagande et même la jeunesse hitlérienne. A travers ce profil, on retrouve déjà ce que sera le futur Che : plein de courage et de détermination, il est dans l’action perpétuelle pour défendre une cause juste. Beaucoup d’éléments réels se mêlent ici à une aventure d’espionnage classique. Tout tourne autour de ce fameux hôtel, nid de guêpes occupé par des Allemands pour des projets obscurs. L’histoire d’amour entre le jeune Ernesto et Helena participe également à cette romance du récit. Cependant, Diego Agrimbau est doublement habile, puisqu’il imagine des évènements qui auraient très bien pu avoir lieu (comme il le dit dans ses annexes) et rajoute un nouvel élément (fictif) à la légende de Che Guevara. C’est aussi une occasion de fournir une construction idéologique à l’adolescent, pour comprendre le résistant qu’il a ensuite été. L’album est surtout remarquable par le dessin de Gabriel Ippoliti. Avec un trait sûr et plein de finesses, le graphisme est tout simplement époustouflant de maîtrise et de beauté. Les visages dégagent une vie incroyable (certains plans d’ « Ernestito » sont bouleversants d’authenticité et de charisme) et les couleurs sont feutrées et saisissantes : du grand art ! Un premier tome sympathique et finement réalisé...