L'histoire :
Basile est blasé. Le trentenaire a fait le tour de son célibat ou plus certainement, de la totalité des filles inscrites à l’agence matrimoniale chargée de trouver chaussure à son pied. Alors tant pis : il ira se désinscrire et continuera de vivre chez maman. Pourtant, il n’y a pas si longtemps, il était sûr de son charme : son coté américain lui semblait être un formidable atout. Le seul problème c’est qu’à Laon, des semi-amerloques il y en a légion : l’armée américaine y a eut une base aérienne pendant 15 ans… Son père, Basile n’en connait que le prénom : Henry. Le bonhomme a séduit un soir sa mère et puis il est reparti aux USA. Depuis, Basile se contente de le rêver ou de peindre avec obsession New York. Un peu comme si, par magie, il allait enfin, d’un coup de pinceau, faire jaillir ce géniteur inconnu du tableau. Sa mère, quant à elle, s’est toujours refusée au moindre commentaire, préférant s‘enfermer dans sa passion pour le piano… Il y a peu de temps que Basile a refait surface à Laon, abandonnant ses études aux beaux arts pour retrouver sa ville, son copain Rémi, mais aussi les souvenirs parfois douloureux du passé américain de la cité…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le titre choisi par Gabrielle Piquet évoque les naissances fortuites. Ces petites bouilles fripées qui pointent le bout de leur nez 9 mois après que le feu incontrôlable du désir se soit manifesté au creux des ventres des futurs parents. Basile est l’un d’eux : le fruit d’une rencontre sans lendemain entre sa mère et Henry, un soldat américain en garnison dans les années 60, dans la base aérienne de Laon. Centrant sont récit sur ce trentenaire célibataire, l’auteure livre avec intelligence un scénario entrelaçant le poids du secret familial et les conséquences de l’américanisation temporaire d’une ville française. Le vide laissé par le départ des troupes américaine, le fantasme du souvenir de ces faiseurs d’Eldorado, les dommages collatéraux constituent le premier ingrédient qui nourri notre curiosité. Au-delà, c’est le silence entre un fils et sa mère (chacun reclus dans sa monomanie musicale ou picturale), le tabou de la filiation (et les fantasmes qu’il engendre) qui fixent notre attachement. Et puis il y a cette judicieuse surprise qui, en bouclant l’intrigue, donne tout son sens aux 200 pages. On comprend ainsi ce qui engluait mère et gamin, on se satisfait des premiers pas de Basile sur le chemin de l’épanouissement. Si le trait de Gabrielle Piquet ne fait pas dans le « joli », sa finesse et sa transparence ont quelque chose d’incroyablement attachant. De la même manière, l’entrelacs des scènes provoquées par l’affranchissement de cases, donne à l’ensemble une étonnante fluidité. Une « intelligibilité » graphique qui, à l’instar du scénario, fait de cette lecture un moment singulier et touchant.