L'histoire :
Quelque part dans une Chine d'autrefois, fantasmatique et peut-être rêvée, un vieux mandarin règne sur un royaume en déliquescence. Sous la pression des européens, l'opium se déverse sans retenue sur le pays et le gangrène. La révolte des Taiping gronde. Mais, le seigneur Fu Shu-Ing n'est que l'ombre de ce qu'il fut. Harassé par le poids des ans, il a perdu la raison et décide de partir en guerre, contre l'avis de son fils et de ses officiers. Il faut dire que les ordres qu'il donne peuvent surprendre : attaquer l'ennemi en s'armant de légumes n'est guère recommandé, sauf si évidemment on souhaite mourir. Seul, le fidèle So-Eyon fait respecter à la lettre l'intégralité des ordres de son maître, même si l'aspect délirant de ceux-ci lui échappe. En effet, il a juré obéissance au seigneur Fu et son honneur est exigeant. Peut-être son aveuglement s'explique t-il par la folie qui a gagné sa femme Jiang. Pourtant, est ce vraiment la folie qui peut… faire pousser de petites branches sur le corps d'une femme ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
D’emblée, une mise en garde : cet album est extrêmement violent. On se bat à coup de sabres, les têtes volent, les corps sont fendus de bas en haut et le sang coule à flot. Le dessin de Tentacle Eye s'adapte parfaitement à ce contexte, en une démarche esthétique qui passe notamment par un saisissant travail de couleurs. Les thèmes abordés par Antoine Ozanam dans cette histoire sont intéressants, quoique assez classiques : en proie à la folie d'un chef, faut-il obéir sans rechigner aux ordres les plus absurdes ? Les traiter dans un cadre asiatique l'est également, même si l'intrigue se passe cette fois en Chine et non au Japon, comme nombre de récits sous influence manga. Toutefois, réduire cet album à ce questionnement serait réducteur. Dès la première scène, un couple s'embrasse dans un champ de tournesol ; les formes se lovent contre les couleurs et le jeu formel auquel nous sommes conviés se dévoile. Il se dégage une atmosphère particulière, quasiment onirique, qui se révèle peu à peu autour de la relation entre Eo-Eyon et sa douce, la belle Jiang. Il est clair que cet album a beaucoup d'arguments pour plaire. Gageons qu'il saura trouver son public…