L'histoire :
16 mars 1942, Leningrad est encerclée de blindés allemands. On s'attend à l'assaut final annoncé par les troupes d'Hitler. Le rationnement fait rage et la population affronte avec courage les privations, sans défense face à la puissance de l'envahisseur. Un caporal rescapé, qui a réussi à franchir les lignes allemandes, demande à rencontrer le général Belyski, commandant en chef du front de Leningrad. Il lui apporte pour tout renfort une lettre de mission de Staline en personne, accompagnée de la partition d’une symphonie composée par le grand Dimitri Chostakovitch. L'objectif fixé par Staline est simple et apparemment absurde : lorsque l'ennemi attaquera, les habitants de la ville, depuis le bâtiment ravagé de la Philarmonie, résisteront en jouant cette somptueuse symphonie, qui sera retransmise sur haut parleurs dans toute la ville. A travers les espoirs symboliques qu'il suscite, la mise en œuvre de ce projet va redonner le goût de vivre aux musiciens de l'orchestre…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Sous l'apparence d'une BD « à la marge », cet album original et atypique propose un récit ample et profond, romantique et beau, sur la résistance de simples musiciens face à la violence de la guerre. L'histoire (réelle !) de cette symphonie jouée en août 1942, au cœur de Léningrad assiégée, est brillamment rendue par les auteurs en 100 pages poignantes, maîtrisées de bout en bout. Au scénario, Céka démontre à nouveau qu'il peut toucher à tout avec intelligence et pertinence. Son récit laisse délibérément de coté les aspects politiques de l'affrontement en cours entre nazis et soviétiques, pour se focaliser sur les individus au cœur de la tourmente. Le dessinateur Borris (qui signe ici, après quelques recueils collectifs, son premier album) fait le choix original de personnages zoomorphes, à faciès de cochons… ce qui risque de repousser certains lecteurs. Pourtant, dès les premières pages, on ne lâche plus l’album. Le talent de mise en scène du jeune dessinateur éclate. Les séquences s'enchainent avec brio, montant en puissance vers un final impressionnant. Le label KSTR montre une nouvelle fois que Casterman propose au public BD des œuvres ambitieuses et complexes, loin des canons de l'efficacité marketing, mais qui recèlent des trésors d'intelligence.