L'histoire :
Il est 16h45, ce jour là, quand les secours et la gendarmerie arrivent sur le lieu du drame : le conducteur du train Lyon-St Gervais, lancé à 140 km/heure, n’a pu éviter de heurter violemment Édith et Fernand, 2 octogénaires qui semblent s’être volontairement placés sur la voie. Appelé sur les lieux du drame, le directeur de la maison de retraite où ils étaient pensionnaires est consterné. Il ne comprend pas. Les deux époux, bien que plutôt réservés, semblaient en pleine forme et heureux. On venait même de fêter « Aux coquelicots », il y a quelques semaines, leur 50e anniversaire de mariage. Ce jour là, tous avaient pu constater combien ces deux là s’aimaient, de manière indestructible, contant à chacun, le jour de leurs noces, les recommandations familiales, la photo, les bons copains ou l’original curé. Pourtant, à la maison de retraite, certains ont du mal à comprendre qu’un mariage heureux puisse tenir aussi longtemps. Eux qui ont eu du mal à dépasser les 5 ans... Quoiqu’il en soit, Édith et Fernand se sont aimés jour après jour, sans jamais se quitter un instant. Et ce, malgré le travail harassant et quelques coups de grisous. 18250 jours ensemble, sans qu’ils aient pu s’en rendre compte, prêts à en refaire autant…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Utilisant un fait divers dramatique, décrit par un entrefilet et une photographie en 4e de couverture, Jacky Goupil compose une partition nostalgique autour de l’histoire d’un vieux couple amoureux pour la vie. Cinquante années de vie commune parfaitement ordinaires sont ainsi montées en un jeu de flashbacks (parfois un peu périlleux) et mis en parallèle avec quelques faits marquants de notre société (réexaminés par quelques précisions historiques post-récit). Et c’est bien là l’essentiel de cet ouvrage qui, sous couvert d’un « suspens » ayant pour objet l’explication du geste irréversible des 2 octogénaires, s’emploie peut-être essentiellement à nous confier un rôle d’observateur : de la rencontre au mariage ; des projets simples à l’acquisition de cafés successifs ; de la retraite aux voyages, jusqu’à la vie à la maison de retraite. L’ensemble est offert de manière timide, s’interdisant par respect et pudeur de creuser. Du coup, on n’arrive même pas à effleurer la raison de cet amour total et indélébile, raison unique de leur choix final. C’est un peu dommage, car chaque protagoniste (et surtout les rôles secondaires) a un fort potentiel, une capacité empathique indéniable. Mais ça ne prend pas. Bref, et même si le récit distille une formidable palette de valeurs profondément humaines, on a du mal à être touché. Le dessin, souvent peu lisible (beaucoup de vignettes par planche pour des phylactères bien garnis…), ne nous permet jamais, non plus, de réduire la distance prise par le propos. On aurait pourtant tellement aimé se fondre dans ce récit bâti autour d’un fait divers qui interpelle, forcément.