L'histoire :
Début 1917. A sa prise de fonction en décembre, le nouveau généralissime du camp allié déclarait « être sûr de la victoire » ; sur le front, les soldats regardaient dans les arbres les cadavres décharnés de leurs compagnons, ce à quoi ils ressembleraient peut-être d’ici la fin de journée. Si les Allemands reculaient, c’était plus par stratégie que résignation. C’était pour se remettre sur la gueule de plus belle, même si la lassitude était grande chez eux aussi (…). Si la guerre se déroulait exclusivement du côté français – pas une maison d’un village allemand ne fut inquiétée – chacun récoltait sa moisson d’invalides et de morts. La mitrailleuse faisait ses ravages dans les deux camps également. On avait beau s’enterrer, les obus venaient quand même vous cueillir lorsqu’on s’y attendait le moins. On voyait les copains y passer et on attendait son tour. Il viendrait, c’est sûr. Alors, « agonisant », on chantait à perdre la tête. Des paroles comme celles de la « chanson de Craonne » (où beaucoup y restèrent) que n’appréciaient pas ces officiers du haut commandement. Le jeune François Paulet fut de ceux qui furent arrêtés. Jugé pour incitation à la mutinerie et déshonneur de l’uniforme. On ne lui avait pas demandé son avis quand on était venu le chercher pour l’envoyer à l’abattoir, et maintenant qu’il l’ouvrait, on le fusillait « pour l’exemple », comme ils disaient…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Année 1917. Le nouveau généralissime des forces alliées, Nivelle, déclare à sa prise de fonction : « L’expérience a fait ses preuves, la victoire est certaine, je vous donne l’assurance (que) l’ennemi l’apprendra à ses dépens ! ». Mais quel est l’ennemi ? Le lieutenant Colonel Malot écrira plus tard dans sa Vérité sur la guerre : « Jamais chef n’eut plus grand pouvoir que le généralissime de (la guerre de) 1914 ! Et jamais chef ne répondit aussi peu aux espérances fondées sur lui ! ». C’est par ces mots que débute ce second tome du journal de la Grande Guerre, ouvert par Jacques Tardi et l’historien Jean-Pierre Verney. Un an après la commémoration des 90 ans de l’armistice de 1918 et la disparition des derniers poilus, les auteurs redonnent la parole à l’un des leurs. Une Putain de guerre !, on ne le répètera jamais assez, qu’on jura la dernière des dernières – la Der des ders – … pour se remettre sur la gueule (en pire ?) 20 ans ensuite. L’Homme apprendra-t-il jamais ? Tardi enfonce en tout cas le clou. L’auteur de C’était la guerre des tranchées y revient, comme pour rappeler un devoir de mémoire (expression consacrée, ici, très justement) impérieux. 45 planches de presque N/B à la valeur documentaire et didactique exemplaire. Témoignage indirect – narré entièrement « off » – à valeur de reportage. Images déjà vues de ruines et gueules cassées. Mais où était l’Humain en 1917 ? On conclura sur ces mots à propos d’un fusillé « pour l’exemple » : « On l’avait déguisé en tueur et maintenant on l’assassinait parce qu’il ne voulait plus marcher dans la combine ». Putain de guerre ! On ne le répètera jamais assez. A noter qu’un poignant dossier accompagne l’ensemble. Une édition DVD bonus enrichie, en prime.