L'histoire :
Hondo est un garçon mauritanien élevé par un chamelier violent et cupide. Amoureux de la fille de son employé, il veut l’épouser mais doit se sauver dans le désert à cause d’une tempête. Aux portes d’Abidjan, Hondo se fait une promesse : il récoltera de l’argent pour racheter les chameaux de son ancien maître et pouvoir épouser la belle dont il est amoureux. Livré à lui-même, il suit deux trafiquants d’organes qui assassinent et découpent les cadavres. Hondo est très vite arrêté et rencontre le commissaire Zéphyrin. Il se lie également d’amitié avec le jeune Boubakar, ancien enfant soldat à Sierra Léone. Les deux amis parviennent à s’évader et se cachent dans un quartier d’Abidjan, entourés de « Toubabs » (les hommes à peau blanche). Cette fois, ils passent un serment : celui de toujours se protéger et aider l’autre. Ils veulent récolter de l’argent pour récupérer la kalachnikov de Boubakar et se venger de tous ceux qui les ont fait souffrir. Malheureusement, ils vont très vite se heurter à la difficulté du mode de vie du pays…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Noir : voici le résumé de cet album. Noir comme la collection Rivages Casterman Noir qui offre une série de polars souvent écrits par des romanciers. Jean-Claude Derey adapte son propre roman et on y sent la patte de l’écrivain. Les textes sont sobres et efficaces, l’intrigue se dévoilant au fur et à mesure et ménageant quelques surprises. Les personnages sont également bien travaillés, avec des caractères bien trempés, donnant lieu à des oppositions fortes : le commissaire – et sa fâcheuse manie de manipuler les innocents – ne cesse de poursuivre l’honnête Hondo et son ami violent Boubakar, sans compter tous les trafiquants et autres bandits prêts à tout pour s’enrichir. Le rythme est ainsi savamment orchestré, donnant un ton poisseux à l’ensemble. En effet, ce polar ne laisse aucune place à l’espoir et Hondo va de désillusions et désillusions, de galères en galères. Tous ceux qu’il côtoie sont pourris par l’argent, la drogue, la corruption ou la perversion. Les toubabs se comportent encore en colonisateurs racistes et tout-puissants, la police est brutale et sans foi ni loi. Au milieu de cet enfer, il faut bien survivre et tout est bon pour gagner de l’argent CFA : trafic d’organes, dealer de la cocaïne, voler aux toubabs, voire même se prostituer avec des Canadiennes en mal d’exotisme ou avec des pervers qui aiment piéger leurs employés en les poussant dans leur lit… Noir comme l’Afrique. Les auteurs mélangent leur culture et leur origine pour un récit dépaysant : le dessinateur béninois Hector Sonon s’allie avec Derey, d’origine syrienne. Cette alliance, qui rappelle l’amitié entre Hondo et Boubakar, permet de présenter un tableau juste et saisissant de l’Afrique et de ses difficultés quotidiennes. Le langage, le mode de vie et le contexte social sont une toile de fond intéressante à découvrir. Le trait, qui se rapproche de Loustal (Hector a suivi des cours de dessin à ses côtés), est faussement naïf et mime parfaitement le « style » africain. Une série noire, classique mais rondement menée.