L'histoire :
Depuis sa plus tendre enfance, Joe Egan est terrorisé par l’apparition régulière d’une femme, une blonde vêtue de noir, systématiquement annonciatrice d’une mort dans son entourage. La première fois qu’il l’a vue, c’était justement pour la renseigner sur l’adresse d’un voisin mourant, alors qu’il jouait au foot dans la rue. Elle connaissait tout de lui et lui avait alors promis : « on se reverra ». Puis un jour, alors qu’il faisait du canoë sur une rivière, elle se tenait sur la berge… et Joe apprenait le soir même que sa mère s’était tuée dans un accident de la route. Puis un voisin de chambrée aux urgences pédiatriques trépassait durant la nuit, juste après qu’elle l’ait visité. Puis il l’avait oubliée, durant très temps. Le temps de se faire une situation professionnelle, de se marier, de trouver à arrondir ses fins de mois en devenant joueur professionnelle, la nuit. Et puis il s’était fait surprendre lors d’une soirée entre amis. Elle état là, et une bagarre mortelle pour une histoire de cocufiage avait éclaté. Depuis, Joe n’avait eu qu’une idée : fuir en permanence. En changeant d’adresse chaque soir, elle ne parviendra peut-être pas à le retrouver !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans la digne lignée noire de chez noire de ses prédécesseurs au sein de la collection Rivages/Casterman/Noir, l’adaptation en BD de Trouille, roman de l’américain Marc Behm, nous plonge instantanément dans une atmosphère glauque à souhait. C’est bêtement l’histoire d’un type qui fuit la mort, après qu’elle lui ait donné rendez-vous, tout au long de sa vie… Un peu comme nous tous, quoi, à la différence que chez lui, la grande faucheuse est personnifiée en une quinqua blonde, annonciatrice prémonitoire de drames irréversibles. Adapté par Jean-Hugues Oppel, d’ordinaire plus habitué à manier les caméras (ou sa plume d’écrivain), le long trip funeste de Joe se fait à 95% en voix off. Quelques rares bulles viennent donner le change, pour épauler une narration distanciée et lugubre. Il s’agit d’ailleurs presque plus d’une chronologie illustrée que d’une véritable bande dessinée, car le découpage du dessin de Joe G.Pinelli s’affranchit de toute idée de cases : son trait tourmenté prend corps au sein de planches toutes pleines, entremêlant les sentiments et les faits du héros en un récit essentiellement suggéré, où plane un puissant fumet d’onirisme. L’expression « roman graphique » prend donc ici tout son sens. Ça a « de la gueule », même si on peine souvent à distinguer les personnages ou leurs actes… même si le final ne comble pas vraiment notre attente. Mais après tout, on sait tous comment ça finit, non ?