L'histoire :
Un jeune homme bien sous tous rapports prépare son concours, qui doit avoir lieu dans un mois. Pour se détendre un peu, sa copine lui propose de se rendre à une fête déguisée. Au préalable, il doit acheter un costume, d'autant que Spock et Zorro seront présents. Chez le marchand, son choix se porte sur le déguisement de cycloman, le vendeur lui indiquant toutefois qu'il ne doit sous aucun prétexte toucher un bouton qui se trouve sur le torse. Note est prise, les deux tourtereaux se rendent à la soirée. Problème : une femme attirée par l'accoutrement appuie sur le bouton interdit. Conséquence immédiate, l'homme se retrouve prisonnier de son armure, incapable de retirer le casque, de pisser, de sortir en ville ou de parler normalement à sa copine. Il a beau essayé le marteau, rien ne fonctionne. Voilà, c'est fait, il est devenu bien malgré lui un super-héros qui se nourrit d'éclairs et de crottes grâce à ses tentacules. Certains évoquent même « une espèce d'humanoïde en acier », sorte de super-maçon-man capable de dompter les immeubles. Encore plus étrange, l'armure de cycloman commence à grandir et le voilà homme à l'intérieur de son costume, un costume qu'il doit maintenant piloter pour sauver le genre humain. Car pendant ce temps, à l'autre bout du monde, la nature se déchaîne : cyclone, tremblement de terre affolent les populations. La planète semble en danger...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Publié à l'origine en 2002, Cycloman était alors passé inaperçu. Il renferme pourtant des trésors d'intelligence scénaristique jouant avec le mythe du super-héros. On a tous (ou presque) rêvé un jour d'en devenir un, DC et Marvel ayant su en créer d'innombrables pour nourrir notre imaginaire d'enfant. Mais Charles Berberian, lui, en a inventé un unique et inimitable : Cycloman, un monstre tentaculaire en acier. Dans une sorte de pastiche loufoque du récit de super-héros, l'auteur joue avec les codes du genre et les maîtrise à la perfection, avec le justicier Cycloman à la double identité opposé au vilain, une planète Terre en proie à l'apocalypse, des super-pouvoirs et des costumes en pagaille. Mais la valeur ajoutée du récit réside dans la faculté à marier le genre avec une narration de l'intime façon chronique sociale, avec des sentiments et des personnages bien réels, tout en ajoutant une petite conspiration politique et une mise en abîme terriblement maline (voir l'épilogue dans lequel chaque lecteur de BD pourra se reconnaître). Le tout restant cohérent du début à la fin, de manière assez étonnante. C'est spectaculaire, drôle, épique, touchant, fulgurant et plein de surprises. Le scénar est toujours simple mais étudié, Berberian prenant plaisir à multiplier les rebondissements improbables. Grégory Mardon, qui s'est affirmé en solo depuis avec L'extravagante comédie du quotidien, use d'un trait spontané, dynamique dans les scènes d'action et doux dans les scènes plus sentimentales. Hommage sincère aux super-héros et mise en abîme intelligente du mythe, cette réédition de Cycloman se dévore le sourire aux lèvres, comme un enfant émerveillé. Comme quoi, même les Français savent faire d'excellentes histoires de super-héros. Dans le même registre, on n'oubliera pas Fantax et plus récemment Masqué.