L'histoire :
En l’an 809, quelque part en orient, le jour-même de la mort du souverain Harûn Ar-Rachid, l’existence de Tahar, un jeune orphelin qui vit de menus larcins, bascule : alors qu’il vient d’être pris la main dans le sac et qu’on s’apprête à le châtier, le riche et noble Maître Nassim El Abar le prend sous sa protection. Il devient ainsi son fils adoptif et reçoit par conséquent la meilleure des éducations. Mounir, le fils ainé du notable, n’accepte pas le nouveau-venu et lui fait subir des brimades quotidiennes, que seule la tendresse d’Aïcha, la fille ainée, lui permet de supporter. C’est pourquoi, quelques années plus tard, le jour des noces de sa sœur, qui marque aussi son futur départ, Tahar décide de quitter la demeure de son père adoptif. Il est en effet persuadé qu’aux yeux de ses frères, il restera à jamais Tahar le bâtard, le serviteur. Mais au moment où il souhaite informer son père de sa décision, celui-ci, pris d’un soudain malaise, s’évanouit. Le jeune homme remet donc son projet à plus tard… Quelques heures plus tard, après s’être un peu reposé, Maître Nassim qui souhaite retrouver ses convives, tombe nez à nez avec une splendide jeune fille en train de lui dérober des bijoux. Il poursuit alors la belle intruse jusqu’à un camp de nomades installé aux abords de la ville. Mais ce n’est pas le vol de quelques perles qui pousse le riche seigneur à la poursuivre : la jeune femme ressemble trait pour trait à sa défunte épouse, Yasmina…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les Editions Daniel Maghen ont une solide formation de chercheur d’or : ils réussissent, quelques mois après Canoë Bay, à ajouter une nouvelle pépite à leur catalogue. Cette fois, le joyau prend les contours de l’orient via une intrigue aux tons chauds et dépaysants, qui nous rappellent les heures jouissives passées à voyager sur les tapis des Mille et une Nuits. Pourtant, loin de fournir une pâle resucée du célèbre recueil oriental, Christian Simon et Fuat Erkol s’approprient parfaitement cet univers pour un scénario qui décolle impeccablement : le propos est crédible, les personnages attachants, l’intrigue accrocheuse, sans avoir besoin de jouer l’épate à tout prix. Avec ce récit qui met finalement le doigt sur la difficulté de faire des choix et les conséquences de ceux-ci, on est très proche de la dramaturgie shakespearienne et on s’impatiente déjà des remous probables à venir. Allié à l’excellente mise en couleur de Guy Raives, le trait d’Ana Luiza Koelher, une artiste brésilienne qui signe ici sa première BD, participe amplement à la réussite du projet. Le graphisme nimbe d’une incroyable sensualité le propos, inspiré par les illustrations des années 40-50 et enrichi par un dynamisme étonnant, un soin unique à détailler décors, architectures ou vêtements. On est donc agréablement transporté dans la magie de cet orient incontestablement riche et fascinant. Un univers qui devrait, d’ailleurs, plus régulièrement donner envie aux créateurs de notre 9e art chéri.