L'histoire :
Patrick est gardien au musée du Louvre, généralement affecté à la salle où se trouve la Joconde. Il n’en peut plus de cette célèbre toile énigmatique que les visiteurs du monde entier veulent tous voir. Qu’est-ce qu’elle a de si énigmatique d’abord ? Son sourire moyennement franc ? Le fait qu’on a l’impression qu’elle vous regarde où que vous soyez dans la salle ? Les touristes l’emmerdent. Surtout ceux qui râlent parce qu’on leur dit que le musée ferme au moment même où ils arrivent. Cette idiote de caissière les a encore laissés passer après l’heure limite. Les collègues de Patrick l’emmerdent aussi. Surtout ceux qui l’appellent « Patoche », qui lui refilent toutes les corvées et qui oublient volontairement de l’inviter à leurs soirées. Patrick est à la veille de ses 50 ans, il est toujours célibataire et il vit toujours avec sa vieille maman, qui le méprise. Elle ne lui a jamais parlé de son père, qu’il n’a jamais connu… et ce défaut d’origines lui manque cruellement. Or un jour, alors qu’il est une nouvelle fois posté dans la salle du portrait de Mona Lisa, il entend clairement celle-ci lui parler. La Joconde lui dit : « Viens, Patrick ». Alors Patrick enjambe la corde de sécurité et s’approche... jusqu’à passer sa main au travers du tableau.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les éditions Daniel Maghen sont installées rue du Louvre, à 100 mètres de l’un des plus célèbres musées du monde, ancienne résidence des rois de France. Le galeriste-éditeur se trouve donc aux premières loges, s'agissant d'un album sur la figure et les sources d’inspiration de la Joconde, le plus célèbre tableau du monde. La scénariste Théa Rojzman nous invite pour cela à un voyage onirique, à la suite d’un gardien de musée las de sa vie. Patrick, alias Patoche pour ses collègues qui en ont fait leur bouc émissaire, est moustachu, quinquagénaire, célibataire. Il vit, désœuvré, avec sa vieille mère, aigrie, qui lui colle encore des taloches ; et il trouve tout le monde con. Un cliché du looser pénible, comme on n’en fait plus. Un évènement fantastique va alors se greffer sur ce destin pathétique : la Joconde herself appelle Patrick à le rejoindre. Ce qu’il fait, au sens premier ! S’ouvre alors une parenthèse onirique, comme en faisaient les Giuseppe Bergman ou les Epoxy dans les années 80, qui ne se refermera jamais. Patrick passe de l’autre côté du tableau (un procédé carollien classique) et découvre la Toscane du XVIème siècle, côtoie Léonard de Vinci et il retient subitement une leçon primordiale : qu’il se prenne en main, qu’il réagisse, qu’il fasse quelque chose de sa vie. Il est temps qu’il cesse d’être con. Merci Mona Lisa. Cette partition narrative un peu convenue et très souple permet à Joël Alessandra de s’éclater avec les vues plongeantes, panoramiques, animées et détaillées de Florence du début XVIème, ainsi qu'avec les œuvres du génie de Vinci, de son dessin typique aquarellé et nimbé de belles couleurs – ou en teintes de bleus pour le présent. Le voyage temporel et culturel est assuré.
