L'histoire :
Le 15 octobre 1917, Margareth Zelle Macleod, plus connue sous son nom de « scène » de Mata Hari est conduite au poteau d’exécution dans les fossés de la forteresse de Vincennes. Au terme d’un procès qui l’a rapidement désignée coupable d’espionnage au profit de l’ennemi allemand, elle doit être fusillée. Elle refuse le bandeau devant les yeux. En attendant la détonation fatale, elle se souvient des années qui l’ont conduite ici. Vingt ans plus tôt, elle vogue en compagnie de son époux, le capitaine Macleod, vers l’île de Java où il est nouvellement affecté. Les premiers jours, elle ne voit que le caractère paradisiaque des lieux et profite du statut privilégié que lui confère sa condition de colonisatrice. Mais après quelques semaines, l’ennui quotidien et le comportement de son époux la font déchanter. Dans ses missions, son militaire de mari doit diriger des raids meurtriers sur des villages pour soumettre totalement les populations. Et le soir venu, l’alcool le rend violent et jaloux. Un drame survient alors : leur fils ainé meurt d’une mauvaise fièvre à l’âge de 2 ans. Margareth trouve alors une échappatoire providentielle à son affliction : une nuit de pleine lune, une indienne vient la chercher pour l’initier à des danses rituelles. Des danses lascives et envoûtantes, à la fois pour celles qui les pratiquent que pour ceux qui les regardent…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Mata Hari est décidément à la mode, ces temps-ci, en bande dessinée. En effet, tandis que les Rendez-vous avec X de Glénat lui consacrent un volume, les éditions Daniel Maghen offrent eux aussi un écrin à Esther Gil et son époux Laurent Paturaud pour dérouler une version idéaliste et passionnée de son sulfureux sort. Dans cette version, Mata Hari est présentée comme une dame courageuse, qui a plus subi son destin qu’elle ne l’a dirigé. Courageuse, elle le fut sans doute pour refuser le bandeau devant le peloton d’exécution et auparavant, pour s’être relevée avec un insolent panache de tous ses échecs. Le présent one shot la montre sous un jour bien plus lisse et vertueux que ce qu’en a retenu la postérité – c’est-à-dire une intrigante, une strip-teaseuse, une « cocotte » de petite vertu, naïve et vénale, manipulée par les services secrets français et allemands. La version « romantique » d’Esther Gil semble cependant se rapprocher de la vérité lorsqu’elle la présente finalement comme bouc émissaire fusillée plus pour l’exemple que pour réelle traîtrise en temps de guerre. Evidemment, cette réhabilitation d’image convient bien mieux à la griffe élégante de Paturaud. L’artiste n’a pas ménagé ses crayons pour livrer une peinture d’époque de toute beauté, avec de magnifiques panoramas de Java ou des décors parisiens luxueux (le musée Guimet), des scènes de danse lascives (et habillées…) aussi envoûtantes que le regard de braise et monocorde de cette sulfureuse actrice tertiaire de la première guerre mondiale. Un dossier annexe en fin d’album revient sur les faits réels, le contexte et les personnages.