L'histoire :
Des dizaines d’alcooliques, hommes et femmes, jeunes ou vieux, mais tous avec un bon pif de pochetron, refont la société sur le zinc d’un comptoir, après avoir pris soin de véhiculer leurs grammes réguliers d’alcool dans le sang. Ainsi, cette femme s’inquiète d’avoir reçu une lettre d’insultes, avec pour toute signature des fautes d’orthographe et des tâches de vin. Son compagnon de beuverie lui fait remarquer que cela doit surement venir d’un alcoolique anonyme ! En terrasse, un couple discute : elle, dit que quand on meurt, il parait qu’on voit défiler toute sa vie d’un seul coup. L’autre lui rétorque qu’il comprend la chose : l’autre soir, après être tombé de son tabouret en croyant mourir, ses 15 vodkas-orange se trouvaient là, sur sa chemise… Deux autres récapitulent la célèbre devise : « Blanc sur rouge, rien ne bouge ; rouge sur blanc, tout fout le camp ». Et ils tentent d’étendre le débat : que se passe-t-il avec blanc sur rouge sur blanc ? Les scientifiques cherchent encore…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le registre des brèves de comptoirs est inépuisable. Prenez un bon troquet – des soirées enivrées entre amis peuvent faire l’affaire – ajoutez une poignée d’orateurs particulièrement en verve, et en quelques rendez-vous, vous avez matière à remplir un recueil… ou cinq. Car Yan Lindingre livre ici déjà le cinquième cocktail, bien dosé et bien secoué, de morceaux de bravoure éthylique. On note cependant deux évolutions dans la série. La première n’aura échappé à personne : Manu Larcenet, peut-être trop accaparé par son Blast ou arrivé au bout de ce job très répétitif, laisse la place du dessin à Jeff Pourquié. On n’y perd pas au change : tout aussi moderne et spontané, le trait de Pourquié un peu « crade » mais parfaitement juste, convient à merveille à ces circonstances envinées. L’artiste parvient à renouveler favorablement l’exercice, sur une partition pourtant monocorde – il s’agit toujours de camper des poivrots qui discutent autour d’un verre. Deuxième petite évolution : contrairement à ce que laisse penser le titre, les tirades fachos sont loin de constituer l’axe principal de l’album. Il y a bien quelques racistes et quelques remarques bien senties sur notre bonne société, mais cette fois, les alcoolos font surtout des vannes sur leur propre propension à boire sans soif…