L'histoire :
Alban et Pablo découvrent, un soir, sur une plage de vacances, l'existence des radios pirates, grâce aux émission musicales de Radio Caroline. La pionnière des radios libres émet depuis les eaux internationales, sur un bateau devenu célèbre auprès d'un public d'initiés. Quelques années plus tard, les ados devenus étudiants décident eux aussi de se lancer dans la création d'une radio pirate, suite à la rencontre de Douglas, un anglais qui a travaillé pendant deux ans sur le fameux bateau. Le dragueur invétéré leur prodigue les conseils nécessaires pour installer un petit émetteur dans un appartement sous les toits, et le relier à une antenne installée pour l'occasion. Radio Nomade est née, et va proposer un programme hebdomadaire composé d'interviews et de musique. Sous les pseudos de Rackham et Teach, ils vont toucher de plus en plus d'auditeurs parisiens, mais surtout être entendus par les oreilles de TDF qui détient le monopole d'état. Les premiers brouillages interviennent lorsque des véhicules spécialement affectés à cette censure d'état s'approchent des signaux émis par les pirates. Tandis que les oreilles policière entendent également les interviews très politiques aux accents parfois révolutionnaires que la radio propose. C'est le début d'une véritable prise de risque personnelle pour Alban et Pablo, dont les divergences de points de vue vont mettre en péril leur vieille amitié.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A travers l'interview d'un ex animateur de radio pirate, dont on ne découvrira l'identité qu'en fin d'album, Laurent Galandon nous emmène dans le récit d'une aventure médiatique éphémère qui précéda l'explosion de la bande FM au début des années 80. En choisissant un duo de jeunes animateurs coachés par un gourou anglais dont les multiples conquêtes féminines semblent la seule raison d'être, il projette un regard forcément décalé sur cette tranche d'histoire récente. La volonté très politique d'Alban, le fils de bonne famille, complète la passion de Pablo pour la musique, les deux jeunes hommes composant le programme d'une radio confidentielle, mais qui a contribué à bousculer l'ordre établi des années Giscard. Les découvertes de pépites musicales s'enchaînent avec des interviews très anti-système. On imagine assez difficilement, avec le recul, l'effet que pouvait faire cette profusion un peu anarchique de voix différentes dans les radios de l'époque. L'intérêt de cet album est là aussi, dans l'étonnement que suscitent les risques incroyables que prenaient des militants de la liberté d'expression, pour une portée finalement très modeste en comparaison de l'impact aujourd'hui de n'importe quel réseau social. Jeanne Puchol parvient à illustrer avec une grande habileté les séquences d'émission dans des lieux toujours différents, et à mettre en scène avec dynamisme une histoire dont les décors n'offrent pas beaucoup de possibilités. Un véritable savoir-faire qui complète le ton politique tout à fait d'époque mais gentiment caricatural que Galandon insuffle dans les dialogues de ses personnages. Une vraie plongée, politique et musicale, dans la fin des années 70.