L'histoire :
En 1938 Jules habite à Chicago, tant bien que mal. Il est immigré italien, il a dix-sept ans, et il cumule les petits boulots, le tout payé au lance-pierre. A chaque fois qu'il passe devant une boutique qui vend des costumes, il se met à rêver. Il aimerait tellement pouvoir se vêtir de la sorte, devenir « quelqu'un », plutôt que d'être un larbin invisible... Exploité par son patron, il se fait avoir tous les mois sur sa paie. Lorsqu'il va la chercher dans sa boutique, il croise toujours un groupe d'hommes bien habillés. Il remarque particulièrement l'un d'eux, qui semble être le chef. Celui-ci est toujours mis en avant et tout le monde le respecte et le craint. Il s'agit d'Adam Czar, un ponte de la mafia locale. Un jour, alors que Jules attend au comptoir, Adam Czar lui adresse la parole. Il l'attrape au visage, tourne sa tête et lui demande quelle est sa cicatrice qui se trouve sur sa joue. Le jeune homme lui répond que cela ne le regarde pas. Adam Czar n'aime pas être contredit et il impose son autorité pour forcer Jules à répondre. Heureusement, le responsable de la boutique revient et coupe court à la conversation. Le soir, Jules est tremblant. Il ne sait que penser, il a peur. Les jours d'après, il continue de croiser Adam et ses hommes. Sur un coup de tête, il montre une nouvelle fois son culot au ponte de la mafia. Il regrette immédiatement... Mais le soir venu, Adam frappe à sa porte. Son attitude lui plaît. Il lui propose de commencer à travailler pour lui. C'est l'occasion pour Jules de devenir quelqu'un, d'évoluer et de viser plus haut.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Anaïs Flogny signe son premier album de bande dessinée au sein de la nouvelle collection Combo de Dargaud. Ce nouveau label vise à valoriser le travail de jeunes auteurs, influencés par divers supports tels que le manga ou le cinéma d'animation. Rivages lointains nous conte les aventures de Jules, un jeune garçon que le lecteur suit sur plusieurs années. Il commence de rien, au plus bas puis, grâce à une rencontre décisive avec un certain Adam, sa vie change complètement. Il découvre l'amour, tout en apprenant à rester discret sur son homosexualité. Mais il va aussi goûter au pouvoir. Et il va adorer ça. Il sait qu'il est fait pour diriger, pour gravir les échelons. Si au début de sa relation cela ne dérange pas son compagnon, son ambition devient un véritable problème lorsqu'il va dépasser le rang de celui qu'il aime. Anaïs Flogny nous plonge au cœur de la mafia, avec un traitement graphique différent de ce qui peut se faire habituellement autour de ce sujet. Le trait est presque minimaliste, sublimé par la couleur, et très élégant. Même les scènes violentes ou plus sombres, ne le sont pas totalement, comme édulcorées par les illustrations. L'album est donc accessible aisément à un lectorat peu familier de ce médium, et il aborde des thématiques intéressantes. Les jeux de pouvoirs, de manipulation, d'emprise, sont très bien traités, le tout dans un univers essentiellement masculin. Une belle surprise que ce premier album. Espérons qu'il soit annonciateur d'autres bandes dessinées aussi délicates.
