L'histoire :
A peine a-t-elle terminée sa mission en Corse, au beau milieu d’un terrible ouragan, que la mercenaire Carmen McCallum file en Mélanésie française pour sauver son ami Brennan. Celui-ci a en effet été kidnappé par Dommy, une intelligence artificielle qui gère le traitement mondial de la distribution et du retraitement des eaux. Ce rapt est en réalité un appât destiné à faire venir Carmen, qui fonce tête baissée dans le piège. A l’aide d’un nano-implant cérébral, que Carmen a inhalé à son insu, Dommy prend le contrôle de son cerveau, le temps d’un tourist-tour didactique dans des mondes virtuels. L’IA emmène la mercenaire à travers les superbes paysages de Nouvelle-Calédonie et elle lui fait un cours sur l’exploitation des hydrates de gaz. Une technologie récente permet en effet de récupérer d’énormes quantités de méthane situé dans les clathrates des grands fonds marins. Et la multinationale Gasprod a obtenu une licence d’exploitation dans la première réserve mondiale, au large des côtes calédoniennes. Or, cette exploitation de masse aboutira à des conséquences écologiques désastreuses, dont l’engloutissement de la Nouvelle Calédonie… Hélas, les enjeux financiers priment largement, pour Gasprod, sur les populations et l’écosystème. Dommy propose donc à Carmen, contre un mirobolant salaire, de saboter le prototype d’usine itinérante d’extraction sous-marine. Seul hic : Carmen agit ainsi contre les intérêts de son amie Christina Ivanov…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Au revoir l’ouragan, la Corse et la (fausse) piste du mazzerisme… notre bondissante héroïne poursuit son « cycle de l’eau » entamé depuis le tome 9 en Nouvelle Calédonie. Carmen McCallum s’y retrouve plus ou moins contrainte de jouer les « terroristes » écologiques – contre un salaire de 300 000 euros par jour, tout de même : elle demeure avant tout une vraie mercenaire vénale. Le scénariste Fred Duval est donc soit à l’avant-garde de notre actualité, soit il a eu le nez creux. Car dans cet épisode, l’exploitation des hydrates de gaz en Calédonie trouve un écho tout particulier dans l’actualité politique et écologique de ce printemps 2011, à travers la question des gaz de schiste en France. Dans les deux cas, ces ressources gazeuses providentielles sont pareillement controversées : la rentabilité pécuniaire prendra-t-elle le dessus sur des impacts écologiques désastreux ? Un petit bémol, toutefois : cette fois, Duval abuse peut-être un chouya sur la puissance des nouvelles technologies (l’implant cérébral inhalable, permettant d’assujettir quelqu’un, est un outil bien trop puissant !) et il appesantit certaines séquences sous de longues explications et palabres, certes didactiques et nécessaires, mais fastidieux. Au dessin, Emem livre de nouveaux des encrages réalistes particulièrement détaillés et besognés, au dépend parfois de la fluidité de lecture. Par exemple, les scènes d’action fonctionnent parfaitement (vers la fin), a contrario des exposés magistraux sur fond de mondes virtuels chamarrés, plus décousus. Mais on a sans doute tendance à ergoter, par amour pour cette série d’anticipation et d’action de haute densité…