L'histoire :
Novembre 1950, dans un quartier insalubre de Quimper. Des gamins d'ouvriers jouent aux billes. Jeannette est inquiète que ses enfants trainent dans la rue car le propriétaire de leur logement risque de les prendre à parti pour les loyers en retard. C'est l'heure du repas, quand Victor, joyeux et certainement soûl, déboule dans leur appartement. Ça y est, il a trouvé une solution : ils vont devenir leur propre propriétaire en s'associant avec d'autres voisins et construire ensemble leur cité. André, son beau-frère, vient confirmer ses dires : un groupe de gars des Jeunesses Ouvrières Chrétiennes vient de créer une association où chacun travaillerait pour construire sa maison. Une expérience similaire à coté de Bordeaux aurait déjà été réalisée avec succès. Une réunion d'information sur ce projet va se dérouler jeudi soir, mais déjà les hommes sont prêts à travailler dur pour devenir propriétaires d'une maison propre et claire.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Alors que la Cité des Abeilles, à Quimper, vient de fêter ses 60 ans, cet album initialement paru en 2015 et aujourd'hui réédité, retrace l'épopée des jeunes travailleurs qui ont décidé de prendre leur destin en mains pour construire cette cité. Le lecteur est immergé dans les prémisses du projet, l'effervescence qu'il suscite jusqu'à l'installation, 4 ans plus tard, de ses habitants. Cette chronique sociale en terre bretonne met l'accent sur la solidarité entre 100 familles, malgré leurs différences politiques, religieuses, syndicales, qui se retrouvent unies par un même rêve : être propriétaire et vivre dans des conditions décentes. Leurs espérances, leurs joies, mais également leurs douleurs, leurs difficultés, leurs inquiétudes, les sacrifices qu'ils ont dû concéder pour améliorer leur qualité de vie, y sont retranscrits avec une grande justesse de ton. Delphine Le Lay, qui avait déjà scénarisé la BD de reportage-historique sur la centrale nucléaire de Plogoff a travaillé avec Marion Boé, petite-fille d'un des initiateurs de ce projet utopique, qui a réalisé en 2008 un film sur ce combat collectif. Ce récit monochrome au trait réaliste, détaillé, transporte aisément le lecteur dans l'ambiance des années 50 et le quotidien de cette classe populaire. A une époque où l'individualisme est dominant, cette BD ressuscite un beau témoignage sur un élan collectif de solidarité.