L'histoire :
Joy avait 18 ans et elle vivait à Yongsan en Corée du Sud. Au beau milieu des immenses immeubles en construction, elle était proche de toucher son rêve : elle voulait être danseuse de K-Pop. Passionnée par le chant et la danse, elle a réalisé l’exploit de rentrer dans l’école de K-Pop que tout le monde convoite. Si elle était heureuse et se sentait chanceuse, ce n’était pas vraiment le cas de ses parents qui auraient préféré que leur fille intègre l’université de Ewha, un endroit réservé aux femmes pour les grandes études. Alors Joy travaille encore plus, espérant un jour rendre ses parents fiers d’elle. Chaque jour, après les cours, elle marche sur le pont de Mapo, l’endroit où les Coréens se suicident le plus. Elle ne sait pas encore qu’un jour, elle aussi pensera à faire comme tous les autres sur ce fameux pont. Puis, un jour qu’elle y retourne de façon machinale, elle décide de s’y arrêter pour la première fois. Elle veut lire les messages qui mettent en garde les gens de sauter et de mettre fin à leur jour. L’une des phrases est : « Vous portez en vous un lourd secret ? » C’est exactement le cas. Joy a un secret qui risque de remettre en question tous ses choix et son avenir. Elle a fait, il y a peu, un test de grossesse : elle est enceinte depuis plus de 4 mois !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cela fait plus de vingt ans que le premier tome de Couleur de Peau Miel a été publié. Entretemps, Jung a continué d’autres projets autour de la thématique de l’adoption en essayant de trouver toujours un angle nouveau, avec notamment la récente série Nos adoptions. Mais ce qui vous attend avec ce nouveau livre est particulièrement sidérant. Imaginez plutôt : une jeune fille coréenne devient célibataire avec un enfant et elle hésite à l’abandonner. Quand elle lit Couleur de Peau Miel, elle est bouleversée et elle se ravise, tentant tant bien que mal de se sortir de cette situation autrement. Cet événement incroyable est bien réel. Jung le raconte en détails. Jamais la métafiction n’aura été aussi forte. D’autant qu’à travers le récit de Joy, c’est Jung qui projette tout son passé en se replongeant dans les traces de sa maman de sang qu’il n’a jamais connue. La narration oscille intelligemment entre l’autobiographie et le quotidien de l’auteur, obsédé par la recherche de Joy, et la vie de la jeune femme en Corée. Comme Couleur de Peau Miel, le ton est parfois acerbe et même encore aujourd’hui, on réalise, horrifié, que la société coréenne n’a pas évolué sur l’abandon et le jugement social. Le ton est souvent dur et sombre à l’image d’un graphisme adulte où les grands aplats noirs rendent les cases amères et ténébreuses. Pourtant, la lumière vient souvent du jaune ou du visage plein de douceur que dessine l’artiste. La poésie du verbe et la profondeur des sentiments atteignent un niveau déchirant et rappellent les plus grandes pages de Couleur de peau miel. A noter, pour compléter cette formidable aventure humaine, que Jung a écrit l’album avec sa femme, aussi présente dans l’album. Une preuve éclatante que l’art peut sauver la vie.
