L'histoire :
Le module lunaire vient de se détacher pour emmener les deux astronautes vers la surface du satellite de la Terre. Nous sommes en juillet 1969 et c'est le couronnement des efforts américains pour poser des hommes sur la Lune, et prendre de vitesse l'Union Soviétique qui a envoyé le premier homme dans l'espace quelques années plus tôt. Tout se passe bien, le silence règne dans la salle de contrôle du Kennedy Space Center, les dernières secondes sont un interminable suspense, et finalement l'engin se pose en douceur. Armstrong et Aldrin descendent le long de l'échelle, le premier marque le sol de l'empreinte de sa semelle, le deuxième le suit avec, à la main, le drapeau des Etats Unis d'Amérique. Ils le plantent dans le sol, effectuent un salut militaire puis s'éloignent avec leur valise d'outils. Ils se sont en fait posés à un endroit différent de celui initialement prévu, leur trajectoire n'a pas été parfaite, mais l'endroit choisi a finalement offert de bonnes conditions pour poser le module. Mais après une marche de quelques dizaines de mètres et l'approche d'un cratère, Armstrong va découvrir un drapeau orné d'une étoile rouge. Un juron lui échappe. Houston we have a problem. Et le centre de contrôle décide de passer sur un canal de communication sécurisé.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Pat Perna et Fabien Bedouel font une incursion spectaculaire du côté de l'histoire alternative et de la rumeur hyper crédible, en imaginant que la course spatiale qui a marqué la guerre froide a connu une autre étape, peut-être remportée par l'URSS. Les trente premières pages de l'album sont très progressives, muettes alors que l'approche de la Lune se termine, spectaculaires dans la lente progression des mouvements et le découpage presque seconde par seconde. L'album restera sur ce tempo même lorsque la découverte incroyable de Neil Armstrong trouvera son explication et qu'on plongera du côté de la version soviétique de l'histoire. On assiste à une sorte de reportage très réaliste, construit comme une vidéo complotiste et expliquant de manière très crédible que si on avait voulu nous cacher une vérité, cela aurait été possible. C'est très bien construit, c'est dangereusement crédible dans la manière habile d'expliquer pourquoi tout cela aurait pu rester caché. L'exercice de style est double pour ces deux auteurs hyper doués : non seulement ils construisent une fake news très structurée, mais en plus ils la mettent en scène avec un langage BD aux limites de la vidéo, fascinant et d'une précision graphique chirurgicale. Bedouel a du construire des modèles d'Apollo pour pouvoir représenter l'engin sous tous les angles, et ses personnages sous leur scaphandre sont d'une expressivité bluffante. C'est malin et c'est très bien fait, bravo !