L'histoire :
Le chevalier de Saint Sauveur est en route vers le Nouveau-Monde, exilé sous la menace du marquis de Mirepoix et des dettes qu'il a à son encontre. Mais un nouveau défi lui a été proposé par celui qui tient son destin entre ses mains. Le marquis d'Archambaud est un rival de Mirepoix et il vient de l'humilier devant la cour de Versailles en obtenant la réussite personnelle pour lui-même et le meilleur mariage pour son fils ainé. Or Archambaud va se trouver en charge d'une mission de rétablissement de l'ordre en Nouvelle-France, et embarquer avec sa fille Aimée sur le même navire que Saint-Sauveur. Ce dernier va se voir chargé d'une mission à la hauteur de son sens de la manipulation : il faut qu'il parvienne à jeter la jeune femme de très bonne famille dans les bras de l'indien Adario. Quelle plus belle humiliation pour d'Archambaud que de voir sa divine fille ridiculiser sa famille en se compromettant avec un sauvage ? Il va tout d'abord falloir expliquer à Aimée que le bel indien qui parle peu est en réalité un prince en exil. Cette nouvelle va changer le regard de la jeune femme sur Adario, comme en témoignent les lettres qu'elle écrit pour sa famille restée en France. Le valet de Saint-Sauveur est toujours un fin observateur des turpitudes de son maître et ne manque pas lui aussi de partager ses observations dans les lettres qu'il envoie à sa tendre Toinette. L'arrivée sur les terres proches de Québec et Montréal et la remontée des eaux du Saint-Laurent vont se transformer en une périlleuse aventure.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le grand manipulateur que représente Saint-Sauveur est évidemment au centre de l'épopée aventureuse que constitue ce tome. Il n'est plus seulement question de lettres à multiple sens et de combines de cour, mais bel et bien de confrontation physique avec le danger. La jeune Aimée est le second personnage principal, ses courriers montrant habilement comment la ruse opérée sur le dos d'Adario va fonctionner. La technique narrative est encore une fois bluffante, dosant à la perfection les scènes qui se déroulent et le récit qui en est fait dans les lettres qui s'échangent. Le dessin de Richard Guérineau semble franchir un nouveau seuil de fluidité et de finesse, tout semble évident dans sa mise en page qui, pourtant, regorge de plans nuancés et subtils que l'on remarque lorsqu'on feuillette l'album sans le lire. Les deux auteurs sont incroyablement compatibles et leurs talents parfaitement entremêlés pour aboutir à des pages très efficaces et d'un grand naturel. Par moments, ils nous offrent une petite pause pour admirer un paysage canadien, comme cette belle remontée du fleuve presque gelé en page 48. On pourrait reprocher à Alain Ayrolles de reproduire une technique qu'il a déjà utilisée et qui a fait ses preuves, mais si le moindre doute existe, la première page le lève immédiatement avec une entrée en matières et un jeu d'acteurs formidables dans le cadre du château de Versailles. Ce très bel album dans un beau grand format complète le pur plaisir de lecture. Bravo les artistes !