L'histoire :
C’est un grand soir ! Par cette nuit enneigée, demoiselle Aube, fille du seigneur humain Arcan, se marie avec Loup-de-feu, fils du seigneur Loup et fier représentant des bêtes de haute taille. Que poil et peau s’unissent ! Pourtant, nul amour dans cette union guidée par la raison politique : le mariage permet aux deux parties ennemies de signer un pacte de non agression. En effet, d’un côté les bêtes redoutent plus que tout l’usage des armes de guerre humaines – les arcs-de-buse ! – tandis que les humains redoutent l’alliance des bêtes de haute taille et de celles de basse taille. Pourtant tandis que la soirée adopte le protocole et les convenances, dans l’ombre un complot se trame. Salviat, le frère d’Aube, a en effet empoisonné Loup-de-feu, avec la complicité de sa sœur, pour faciliter son assassinat au moment de la nuit de noce. Trahison ! Loup-de-feu éventré, le Seigneur-loup enrage. Les bêtes rompent le pacte, pillent, tuent et brûlent le château. Poursuivis dans la neige par des hordes de bêtes assoiffées de sang, Salviat lance sa sœur Aube, toutes brides abattues, vers le bois des vierges, un endroit sacré, avant d’être lui-même massacré. Le conflit s’en trouve dès lors décuplé, durant de nombreuses années, provocant les mêmes ravages dans les deux camps. Les états-majors décident alors, chacun de leur côté, de faire appel à des seigneurs de guerre : ce sera le légendaires seigneur Clam pour les humains et Loup-gris, frère banni du défunt Loup-de-feu, pour les bêtes…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Des loups et des renards en collerettes et en habits Henri IV… On n’avait pas vu ça depuis De cape et de crocs ! C’est pourtant étonnement ce qui nous est proposé via cette enthousiasmante association d’auteurs. Il n’y avait que Jean Dufaux pour écrire une histoire pareille sans tomber dans le grand-guignolesque ou le ridicule. Car la surprise passée de ce contexte belliqueux zoomorphique, le récit s’avère véritablement palpitant et (évidemment) remarquablement dialogué. Sur un contexte moyenâgeux réaliste (animaux en costumes mis à part), se greffe une trame politique et dramatique palpitante. Alliances, trahisons, vengeances, mouvements militaires, sièges, complots, manigances… le tout mis en relief de somptueuse manière ! Ce récit tragique semble en effet écrit sur mesure pour le style graphique ultra réaliste de Béatrice Tillier (Fée et tendres automates…). Sur un canevas de féerie digne des Perrault, Grimm et autre Andersen, auquel Tillier est coutumière (Mon voisin le père Noël) se mêle la barbarie d’une ère médiévale (Renaissance, plutôt) sans pitié. L’artiste redouble de virtuosité pour un mélange des genres osé et néanmoins convaincant. Dans des décors de toute beauté (intérieurs de châteaux, somptueux panoramas, champs de bataille) évoluent des personnages humains et zoomorphiques en tenue d’époque particulièrement chiadés et expressifs : les loups et renards courroucés couchent leurs oreilles et montrent leurs crocs… Une fresque guerrière et politique brillante et passionnante ! Notons enfin qu'à l'occasion du transfert de Robert Laffont à Delcourt, ce dernier éditeur publie avec la réédition un splendide cahier spécial de 8 pages contenant des croquis et une interview de Jean Dufaux...