L'histoire :
Arnaud, photographe professionnel, vient de se découvrir un pouvoir psychique étonnant : lorsqu’un crime à eu lieu à l’endroit où il prend ses clichés, la scène en question apparaît sur la pellicule ! Se remémorant un rêve bizarre étant gamin, il a développé la pellicule qui se trouvait encore, 25 ans après, dans l’appareil antédiluvien de son grand-père. Sur la photo, il a alors découvert son père en train de jeter un frère qu’il n’a jamais connu dans un puits. Il interroge sa mère, qui lui explique qu’il ne s’agit pas de son père sur la photo, mais de son oncle, et que le drame familial a effectivement eu lieu : l’oncle en question était pédophile et abusait de l’enfant, qui voulait le dénoncer. Mais Arnaud a d’autres soucis : sa copine Maud est de retour dans sa vie intime, depuis qu’elle a appris des révélations de sa mère, sur son lit de mort. Damien Gerbaud, l’un des hommes les plus influents de la région bordelaise, a jadis assassiné son père. Pour se venger, elle lui a dérobé des documents qui prouvent son penchant pour les détournements de mineurs. Elle ignore que l’avocat à qui elle fait confiance travaille lui aussi pour Gerbaud…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce second volet clôt les deux intrigues fantastico-policières entrecroisées entamées au tome 1. D’une part, Arnaud apprend d’emblée la vérité sur le meurtre de son frère et accepte sa nouvelle faculté fantastique de photographier les scènes de crimes révolues, sans l’expliquer pour autant. D’autre part, Maud règle ses comptes avec son ennemi Gerbaud, après qu’on ait compris qu’il est un sacré vilain bonhomme (pas beau). Tout cela se tient à peu près, à condition d’avoir un penchant pour les explications capilotractées… Car il faut accepter nombre d’exubérances moyennement inspirées. Passons sur l’aveugle qui tague les murs comme un dieu… Passons aussi sur les familles des deux protagonistes qui, sans lien aucun, ont étonnamment des mœurs sordides et des penchants pour le meurtre… Passons enfin sur l’appareil photo qui saisie les meurtres passés sur pellicule, alors que Thomas Silane nous fait déjà le coup (depuis 2004)… Le plus gros écueil se situe dans une psychologie des personnages vraiment limite (la relation entre Arnaud et Maud est incohérente, la trahison de l’avocat grossière, et quand nos héros croient avoir perdu la partie… ils vont au resto !). Etant donné que le scénario est signé Eric Corbeyran, le rythme du récit se montre tout de même très efficace et le diptyque se laisse lire avec plaisir. Mais ce 3e œil est loin d’être la meilleure série de ce recordman en matière de quantité de séries BD. Peut-être le dessin réaliste d’Espé, lui aussi très pro, de facture réaliste fort correcte, ne colle t-il pas au mieux à la légèreté du propos… En revanche, le dessinateur plante admirablement l’atmosphère glauque-urbaine qui sied à ce genre d’intrigue, en parfaite adéquation avec un découpage et des cadrages dynamiques. Enfin, signalons une jolie pirouette, à la toute dernière page, remettant en question toute l’action des héros…