L'histoire :
Dans la maison Tuvache, on vend le suicide de père en fils depuis des générations. Pistolets jetables, cordes de pendus, arsenic, katanas, bonbons empoisonnés… Ici, il y a tout ce qu’il vous faut pour passer l’arme à gauche ! Et la clientèle n’est pas avare : dans une ville pleine de buildings, au ciel gris et aux rues mornes, tous les prétextes sont bons pour mettre fin à ses jours. D’autant plus que les Tuvache sont de bons commerçants. Jamais ils ne manqueraient l’enterrement de l’un de leurs clients. Et grâce à leurs conseils, vous serez sûr de trouver un suicide à votre image. Tout se déroule à merveille, donc, jusqu’à la naissance involontaire d’un étrange petit garçon. Les cheveux orange vifs et une affreuse prédilection pour les couleurs, Alan est la joie de vivre incarnée. Pire encore : il sourit ! Il se permet même de dire « à bientôt », « quelle belle journée » ou « comment allez-vous ? » Autant de phrases qui, dans un magasin des suicides, n’ont strictement aucun sens. Que faire alors, de cet enfant à l’enthousiasme outrageusement contagieux ? Ça risque de faire fuir les clients… Les Tuvache voient d’abord ce fils cadet comme une vraie plaie. Ils ignorent encore tout le bien qu’il va leur apporter…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Imaginez un monde où, le soir venu, on prend plaisir à s’installer à sa fenêtre pour regarder les suicidaires se jeter du haut des buildings. Si vous aimez l’humour noir, Le magasin des suicides est pour vous. A travers des teintes d’une grisaille macabre, mâtinées de pluies battantes et de nuages de pollution, le ton du livre devient délicieusement morbide, voire un brin provocateur dans le registre. Même les personnages ont la peau grise et les cheveux marron ternes. Tous, sauf le petit Alan et ses cheveux flamboyants. Les jeux sur les couleurs sont impressionnants et permettent au lecteur de se mettre à la place des personnages. Au fur et à mesure que l’histoire avance et que l’enfant sème la joie de vivre, les couleurs vives prennent plus de place. Adapté du roman à succès de Jean Tullé, le scénario est une petite pépite. Le réalisateur Patrice Leconte a d’ailleurs lui aussi été séduit : sa version ciné sera sur les écrans français à partir du 26 septembre 2012. Le concept plait donc et le livre lui rend largement honneur. L’œuvre n’est pas seulement très drôle ; son charme réside également dans la virtuosité avec laquelle Olivier Ka a découpé et narré la chose, pour Domitille Collardey qui l’a dessinée. Gros plans sur les étagères du magasin ou sur un masque mortuaire, dessin en coupe d’une maison… Peut-être l’album aurait été encore plus agréable à lire avec un dessin plus poussé. Certains traits, notamment les visages, présentent en effet une simplicité qui pourra décevoir. Une BD à lire, paradoxalement, si on veut rire avec la mort…
