parution 05 octobre 2022  éditeur Delcourt  collection Mirages
 Public ado / adulte  Mots clés Ecologie

Les Pizzlys

Trois orphelins acceptent de se « déconnecter » de leur vie urbaine pour aller vivre dans la sauvage et périlleuse Alaska. Une quête initiatique salutaire sur fond de réflexion écologique particulièrement perspicace.


Les Pizzlys, bd chez Delcourt de Moreau
  • Notre note Yellow Star Yellow Star Yellow Star Yellow Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • Scénario Yellow Star Yellow Star Yellow Star Yellow Star

    CHEF D'ŒUVRE   Green Star Green Star Green Star Green Star

    TRÈS BON   Green Star Green Star Green Star Dark Star

    BON   Green Star Green Star Dark Star Dark Star

    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

  • dessin Yellow Star Yellow Star Yellow Star Grey Star

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    BOF. MOYEN   Green Star Dark Star Dark Star Dark Star

    BIDE   Dark Star Dark Star Dark Star Dark Star

©Delcourt édition 2022

L'histoire :

Nathan, 20 ans, est chauffeur Uber à Paris. Il se tue à la tâche pour pouvoir nourrir sa sœur Zoé et son frère Etienne. Tous trois sont désormais orphelins et affrontent soudés, de leur mieux, la complexité de la vie moderne. Il est minuit passé ce soir-là quand Nathan dépose son dernier client de la journée… qui dégueule sur sa banquette arrière avant de s’éclipser. Nathan rentre à son appartement, remercie la baby-sitter et s’assure que Zoé et Etienne dorment bien. Il est épuisé et s’effondre à son tour de sommeil. Le lendemain, il se réveille en retard pour les conduire à l’école. Comble de l’emmerdement, son GPS est en panne. Il passe à une boutique de téléphonie qui lui débrouille le problème et… il hérite d’une nouvelle cliente. Une grosse sexagénaire originaire d’Alaska demande en effet une course jusque Roissy. Bienveillante, cette femme prénommée Annie remarque que Nathan est au bout du rouleau. Tellement au bout du rouleau qu’il se perd dans les méandres de la banlieue, fait un malaise et s’endort. Le choc de sa BMW contre un réverbère le ramène à la réalité. Après un bref passage aux urgences, tous deux écopent d’une minerve. Sans voiture, sans diplôme, sans ressources, Nathan est de plus en plus dans la mouise. Il propose néanmoins à Annie de l’héberger une nuit, jusqu’à son vol du lendemain vers Anchorage. Annie accepte et découvre la situation précaire de la famille, au sein d’une ville toxique qui leur tape sur le système. Elle leur propose à tous trois de se déconnecter et d’aller vivre avec elle dans sa cabane isolée en Alaska…

Ce qu'on en pense sur la planète BD :

Une aigreur poignante s’empare du lecteur qui découvre les Pizzlys au moment même où Bruno Latour, le philosophe anthropologue, considéré mondialement comme un maître à penser de l’écologie, meurt (9 octobre 2022). Avec Les Pizzlys, Jérémie Moreau revendique s’inspirer directement de cette réflexion humaniste. Si sa démarche s’inscrit dans la réflexion salutaire mondiale en réaction au réchauffement climatique, il s’inscrit donc aussi malgré lui dans une funeste actualité. L’aventure initiatique plonge une fratrie de trois orphelins ultra urbains au sein des territoires isolés, sauvages et glacés d’Alaska, sur un observatoire avant-poste du réchauffement climatique. Sans réseau (whaaaat !??), quasi sans électricité, ils vont devoir apprendre à se reconnecter avec le « vivant non humain », comme le préconisait précisément Latour dans sa pensée écologique. Telle est l’unique alternative à la décadente et polluante anthropocène. Nathan, Zoé et Etienne s’infligent cette mutation comme un remède nécessaire. Ils la vivent initialement comme un traumatisme, puis finissent chacun à leur manière à comprendre la lecture du monde et de la nature par un autre prisme que celui de leurs écrans (GPS pour l’un, Iphone et console connectée pour les deux autres). Cela passera par des expériences terribles, tantôt au sein d’un tissu social en plein marasme (isolement, alcoolémie, violences familiales…), tantôt en prise directe avec les conséquences du réchauffement climatique, mais aussi par une démarche quasi shamanique. Leur animal-totem sera un « pizzly », c’est-à-dire une espèce nouvelle entre l’ours polaire et le grizzly, que les modifications climatique ont générée dans la réserve naturelle du Yukon. Moreau joue avec les représentations de la culture inuit et avec le rythme de narration. Aux grands espaces, dans des cases géantes contemplatives et oniriques, répondent parfois le découpage serré d’une vie moderne étriquée et torturée. Par contraste surprenant avec l’appel de la nature, l’auteur utilise une palette de couleurs fluorescentes à l’excès, autour de personnages dessinés aux traits fins stylisés, osant des dégradés flashy en fonds de cases. Le sujet est sensé à plus d’un titre et le procédé interpelle… Voilà un épais album (200 pages, pour 2 ans de boulot) d’une tragique actualité.

voir la fiche officielle ISBN 9782413040811