L'histoire :
Silencieuse, grave et solennelle, la grande faucheuse apparaît quelques secondes avant le trépas de tous ceux qui vont mourir. Au simple regard, les mortels comprennent alors que leur fin est extrêmement proche. Comme cet homme qui s’apprête à prendre le bus… et découvre cette créature squelettique en toge noire lui faire face alors qu’il traverse la rue. Comme une ultime faveur, il lui demande de lui expliquer le sens de la vie. La faucheuse tend alors la phalange de son métacarpe vers le ciel. L’homme regarde donc vers le haut. Et il ne voit pas le bus qui le percute de plein fouet.
Comme ce vieillard mourant dans son lit d’hôpital, entouré de sa femme et de son meilleur ami. Il accepte de partir sans regret, entouré de ceux qui lui ont été fidèles. Mais alors, sans se départir de son sourire inexpressif et squelettique, la faucheuse sort de sa toge une photo de son ami en train de prendre sa femme par derrière, à quatre pattes. Le vieillard clamse instantanément d’une crise cardiaque.
Comme ce parachutiste qui s’aperçoit que la faucheuse plonge dans le vide en même temps que lui. Mais lorsqu’il déclenche son parachute, celui-ci s’ouvre bel et bien… Alors l’homme croit être sauvé : c’est la faucheuse qui va s’écraser en bas à sa place ! Il se gausse. Hélas, il n’a pas vu qu’il allait atterrir dans une réserve marécageuse pleine d’alligators…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Rions un peu avec la mort. Puisque nous finirons tous par y passer, autant qu’elle nous procure en amont quelques bouffées de rires jaunes et nerveux… Sur des idées de gags cyniques de Marc Dubuisson, Thierry Martin met donc en scène la mythique grande faucheuse, dans tout ce qu’elle a de plus standard : une longue toge noire miteuse, une tronche de squelette, une faux entre les phalanges de la main et un mutisme éloquent (sauf à partir de la p.96). Depuis les représentations du moyen-âge et selon certaines croyances, cette créature morbide apparaîtrait à ceux qui vont y passer. Juste quelques secondes avant, sans laisser le temps de réagir, donc. Ici, à plusieurs reprises, les condamnés se rebellent instinctivement contre la cause de leur mort, qui leur semble évidente et absurde. Hélas pour eux, ça ne sert à rien. La centaine de gags sadiques ici réunis joue ainsi beaucoup avec le ressort de la surprise et de l’immédiateté. A 95%, sa présence est de mauvais aloi pour les protagonistes en place. Mais les auteurs parviennent aussi parfois à tordre le paradigme, afin d’ôter tout aspect mécanique à leurs gags. Evidemment, on n’évite pas quelques lieux communs et une inégalité dans les effets zygomatiques… Mais il en faut pour tous les goûts. Cela dit, dans un registre restreint, les auteurs parviennent fort bien à se renouveler. En même temps, il y a tellement de façons rigolotes de mourir…On note toutefois quelques thématiques récurrentes : les auteurs n’aiment pas trop les chasseurs, les hommes d’affaires pétés de thunes, les mines anti-personnelles…
