L'histoire :
Un manteau neigeux a recouvert le village moyenâgeux. Le jeune Pieter accompagne sa maman sur le marché, où elle vend sa production artisanale : des oiseaux fabriqués en bois et en tissus. Les clients marchandent, les temps sont durs. Le soir venu, le père de famille rejoint, plein de poussière, la demeure familiale, après sa tournée dans les bois. Olaf est chasseur de « lokkens » et il annonce fièrement en avoir tué dix larves dans la journée. Les lokkens sont des créatures ambigües : d’apparence mignonne, lorsqu’ils pendouillent sous forme de larves aux branches des arbres, ils se nourrissent, la nuit venue, des rêves des gens. Or une fois atteinte leur taille adulte, ils revêtent une apparence monstrueuse et deviennent terriblement dangereux ! C’est d’ailleurs à cause de leur présence à proximité du village que tous les oiseaux ont fui la région. Pieter trépigne de pouvoir accompagner un jour son père à la chasse aux lokkens, mais il est encore trop petit. Le lendemain, Pieter accepte par défi – pour rejoindre la bande de deux copains – d’aller cueillir un fruit qui pue dans la forêt. Mais ce faisant, il tombe sur une larve de lokken, dans une bulle et un halo jaune. Celle-ci lui parle, toute innocente, toute gentille… Elle lui demande de ne pas croire ce que lui racontent les adultes. Elle lui fait voir ses rêves et lui demande de l’emmener avec lui. Pieter s’exécute…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Non, Pieter et le lokken n’est pas une relecture flamande de Pierre et le loup. Après être paru une première fois en 2015 dans la collection grand format Les enfants gâtés, les éditions Delcourt rééditent aujourd'hui ce conte original. Olivier Ka a imaginé un conte « de fées » certes un peu étrange, mais carrément flippant (à travers les yeux du jeune public) et bel et bien original. Ici, un enfant héros fait une grosse bêtise en désobéissant à ses parents… et un ennemi d’apparence innocente révèle progressivement sa nature monstrueuse. Comme tout conte qui se respecte, il y a donc une bribe de morale (hé, les enfants, mais vous allez un jour écouter les conseils avisés de vos parents, oui ou crotte ?)… mais cette morale n’est pas non plus trop prépondérante. On retrouve ici le principe de Gremlins (les créatures mignonnes sont parfois des monstres), ou de Pinocchio (le miroir aux alouettes), mais adapté à un contexte médiéval traditionnel. La plus-value se situe tout de même du côté de l’inventivité du récit et de sa trajectoire imprévisible, même si on se doute que tout finira bien (sinon, ce serait un polar hard-boiled). Au dessin, Olivier Supiot s’en donne à cœur joie avec des personnages méga caricaturaux, parfois grimaçants, dessinés avec un rendu gouache et crayons de couleurs, ainsi qu’un surplus de teintes rouges-jaunes… comme à Noël. Son lokken ressemble un peu à un Pokémon® géant, ce qui n’est pas le moindre des atouts pour les têtes blondes. En fin d’album, un triptyque cartonné propose quelques jeux classiques autour d’une belle illustration du village médiéval enneigé.