L'histoire :
Aude en a assez des copines qui font semblant de l’écouter et préfèrent la mélodie de leur portable. Elle en a tout aussi marre de ses histoires d’amours foireuses, de la pluie ou de la machine à café qui entortille ses petits nerfs à tous les coups. Cette jeune graphiste parisienne est simplement à bout. Aussi, quand un client lui réclame une énième taille de couettes pour la petite héroïne de son projet ou lorsqu’il vocifère pour modifier la couleur d’un logo pour la centième fois, elle comprend qu’elle a perdu la petite étincelle qui donnait un sens à son quotidien. Alors, doucement mais surement, elle murit un beau projet : s’isoler sur une île bretonne, une petite semaine avant de prendre le large pour de bon sur un beau bateau. La jeune femme n’a aucune notion de la navigation. Elle voguera donc avec un skipper expérimenté et quelques autres marins amateurs. Avant de partir, elle se prépare en compulsant manuels techniques et autres instruments de torture. Elle ne se lasse pas des récits marins de quelques amis et regrette secrètement que son papa ne lui ait pas transmis cette science de la navigation qu’il maitrisait parfaitement… Boulot bouclé, direction l’île bretonne pour une semaine de tête à tête avec soi-même, au rythme du bruit de l’océan. Bientôt le grand voyage. Mais avant, solitude, écriture, ciel, vagues, manger, dormir et discussions effrénées avec les poules du voisinage…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C’est un bol d’air que nous propose Aude Picault, mais pas de ceux dans lequel chaque planche respire le dépaysement avec moult décors adaptés. Non, en l’accompagnant tout au long de cette Transat, on comprend qu’il n’est jamais trop tard pour prendre le temps de s’oxygéner en regardant l’horloge tourner différemment. Alors, si l’on manque de courage pour définitivement changer ses habitudes ou, comme Aude, si on ne s’offre pas un break de quelques mois, ce petit livre remplit la mission, au moins pour quelques heures. Comme il est de coutume dans la collection Shampooing, l’auteure nous livre une histoire très personnelle qui, au-delà de ce périple en mer, est une double quête (débutée dans Moi Je et Papa) : en s’interrogeant sur le sens qu’elle souhaite donner à son quotidien, elle tente aussi de retrouver un peu de ce père disparu qui aimait tant naviguer, mais qui ne l’a jamais faite monter sur un bateau. Le récit oscille alors entre remarques touchantes, instants drôles, pénibles futilités et situations si familières, qu’on penserait que la jeune femme sait tout de nous. Ainsi, on se délecte à observer le cheminement de ce petit bout de femme qui cherche à ne pas subir sa vie et l’on en regrette simplement quelques enchainements un peu brouillons. L’incroyable simplicité et fraicheur du trait nous fait le coup du « tiens moi aussi je peux le faire » alors qu’il y a un énorme talent à réussir en 2 ou 3 coups un impeccable dessin. Les expressions sont justes, les filles sublimes, rien ne semble impossible à coucher sur le papier. En outre, l’auteure nous offre quelques double pages (aïe aïe aïe, le choix catastrophique du format pour ces dernières), d’une mer calme ou déchainée, de jour ou de nuit, qui prouvent son indéniable virtuosité, aussi touchante que le propos.