L'histoire :
Janvier 2009, Tananarive. Une passe d’armes entre deux politiciens secoue la capitale Malgache. Ravalomanana, le président actuel de l’île rouge, est contesté par le maire de Tanarive, Rajoelina, qui brigue sa place. Les tensions sont palpables dans les rues de la plus grande ville du pays et une étincelle pourrait mettre le feu aux poudres. Au milieu de ce marasme, Nina, une jeune malgache retrouve des amies pour boire un café. Fiancée à un homme carriériste qui pense avant tout à son « business », la jeune femme se sent délaissée. De l’autre côté de la ville, Loom et son groupe Vain répètent pour l’évènement qui va faire bondir leur carrière de rock star, la première partie d’un groupe international. La chance de leurs vies. Alors que les amies de Nina viennent de partir, la laissant seule dans le troquet, le rassemblement des soutiens à Rajoelina, sur la place du 13 mai, dérape. Survoltée par le discours du magistrat, la foule est hors de contrôle. Une émeute éclate et les pillages commencent. Les casseurs lancent des cocktails Molotov sur les façades des boutiques afin de semer le chaos. Les habitants fuient le centre-ville, mais certains sont coincées dans les échoppes en flamme. Nina a juste le temps de se mettre au sol, avant qu’un engin incendiaire ne vienne frapper le café. Alors que les clients et le tenancier s’enfuient en laissant la jeune femme au sol, un objet lourd s’abat sur elle et lui coince la jambe. Évitant de faire du bruit pour éviter de prévenir les émeutiers de sa présence, les flammes gagnent du terrain. La porte s’ouvre dans un fracas assourdissant et Loom apparait devant la jeune femme…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Sous couvert d’une histoire d’amour plutôt classique, Lundi noir sur l’île rouge pointe du doigt la faible stabilité politique de l’île de Madagascar. L’histoire se déroule en 2009, lors du conflit politique opposant le président du pays et le maire de la capitale. Couplé à la crise économique, ce conflit plonge le pays dans le chaos. La vie dans la capitale malgache tourne au ralenti et les émeutes, ainsi que la peur, poussent la population à s’exiler en province, obligeant ainsi les commerces à fermer. Évidement, la situation est profitable, car comme dans toute situation de crise, certains deviennent encore plus pauvres et d’autres encore plus riches. Le scénario est agréable à suivre, mais il est un peu lisse, manquant parfois de punch. Le triangle amoureux Nina, Loom et Daniel, est prévisible ; mais l’idée principale développée par les auteurs, Dwa et Pov, est intéressante et mérite réflexion. Peut-on vivre sans amour pour s’offrir une vie meilleure ? Le rêve de rock-star de Loom n’est-il pas identique au souhait de succès dans les affaires de Daniel ? Les deux hommes ne sont-ils pas faits du même bois et mettent leurs carrières au premier plan ? Nina n’est-elle pas égoïste de demander à son fiancé de mettre son business de côté pour s’occuper d’elle ? Beaucoup de thèmes sont laissés ouverts par les auteurs, et ne permettent pas de définir avec précision la psychologie des différents protagonistes. Du point de vue du dessin, le trait est plutôt simple, mais suffisamment détaillé pour transmettre les émotions des personnages. La majeure partie de l’histoire se déroule en milieu urbain, occultant complètement les paysages de l’île. De plus, on regrettera peut-être le manque de dégradé dans la colorisation, qui expose complètement les cases à la lumière, supprimant au passage les ombrages. Ainsi, la véritable force de cet album tient dans l’histoire se déroulant à Madagascar, dans un contexte géopolitique incertain et explosif.