L'histoire :
Môhitsu Hideo est un calligraphe errant qui ne trouve plus l'inspiration. Un jour, il s'arrête dans la ville d'Iromura et se rend dans une échoppe pour échanger quelques calligraphies contre une paire de sandales neuves et une petite somme d'argent. Il passe ensuite à la teinturerie pour redonner un peu de peps à son hakama, un pantalon large porté par les samouraïs : le sien a été délavé et terni par les intempéries. Chez ce commerçant, Môhitsu rencontre la jeune Atsuko. C'est elle qui s'occupera de teindre son vêtement en rouge profond. Pour cela, la jeune fille lui donne un vêtement de rechange, que le calligraphe enfile derrière un paravent. Fasciné par les peintures ornant le paravent, Môhitsu questionne l'une des gérantes pour savoir qui les a réalisées. Il apprend que l'artiste n'est autre qu’Atsuko. Le lendemain matin, Môhitsu vient récupérer son hakama et en profite pour inviter Atsuko à déjeuner, afin de la questionner sur ses peintures. Il apprend que la jeune fille peint tous les jours, dès qu'elle a le moindre temps libre. Môhitsu lui explique qu'il souhaite l'emmener à Edo, car il est persuadé qu'elle pourrait devenir un grand peintre pour peu qu’elle cultive ce talent. Il a justement un ami, peintre reconnu, qui pourrait la prendre comme apprentie. Atsuko est intéressée mais elle hésite, car Hiroko et Osugi, les deux gérantes de la teinturerie, ont besoin d'elle et elle ne peut les abandonner. Heureusement pour elle, Môhitsu parvient à convaincre les deux teinturières de la laisser partir. Dès le lendemain, ils commencent tous deux leur périple en direction d'Edo, une ville en pleine essor…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce récit se passe durant le Japon d'Edo (ancien nom de Tokyo), période durant laquelle le pays connaît un grand essor culturel et économique. Mais il n'est nullement question de samouraïs et de leur célèbre combat de sabres, l’aspect que l’on retient d’ordinaire de la civilisation nippone de l'époque. En effet, le scénario original d’Antoine Bauza, qui fait ici ses débuts en bande dessinée, raconte l'histoire d'un homme maniant plutôt le pinceau que les armes. Depuis le décès de sa femme et sa fille lors d'une révolte du peuple face à la famine, il est en panne d'inspiration. Lors de sa rencontre avec une jeune fille, qui a non seulement un don pour la peinture, mais également le même âge qu'aurait eu sa fille, Môhitsu trouve l'occasion de lui transmettre ce qu'il sait. Une amitié se crée au fil du temps et permet à Atsuko de progresser, à Môhitsu de surmonter sa douleur et de retrouver l'inspiration. Les 80 pages où se déroule cette histoire sont une pure invitation au voyage. On se laisse porter par le récit tant il est bien écrit et plaisant. Les dessins de Maël sont assez semblables à ceux qu'il a réalisés pour le diptyque Les rêves de Milton (également chez Aire libre). A savoir, des cadrages et des couleurs impeccables et un trait aussi tourmenté que l'esprit de Môhitsu. Un bien bel ouvrage qui, malgré l'absence d'action ou de rebondissements, nous scotche du début à la fin et nous fait passer un très agréable moment…