L'histoire :
Au château, la nouvelle du Comte de Champignac fait l’effet d’une bombe : Zorglub a disparu dans les méandres du passé, précisément en l’an 1865. En effet, ce dernier s’est emparé de l’invention d’un dangereux savant, une machine à fabriquer des « trous de ver » à travers le temps, pour se frotter à la spéculation immobilière. Au XIXe siècle, les propriétés du quartier du Marais à Paris ne valent pas grand-chose ; Zorglub en a donc acheté une certaine quantité à bas coût, comptant bien transporter les titres de propriétés jusqu’à notre époque, dans l’objectif d’une revente fructueuse. Cependant, le voyage d’une personne réclame une énergie considérable. Il a donc construit les installations techniques de sa « Voyaglub » sous la place de la Concorde : l’obélisque servant à canaliser l’extraordinaire puissance des coups de foudre. Le hic, c’est que cet idiot là n’a pas pris soin d’emporter avec lui dans le passé une pastille de carburant de secours, nécessaire pour le voyage du retour… et un bête rat a volé sa place ! Spirou, Fantasio et Champignac décident donc d’aller le récupérer, 142 ans plus tôt…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après le duo Vehlmann/Yoann, c’est au tour de Frank Le Gall tout seul, l’auteur de Théodore Poussin, d’avoir le privilège d’une adaptation en one-shot des aventures de Spirou et Fantasio. Cette seconde version fait honneur à cette série culte, mais laisse comme un léger goût de déception… Fabien Vehlmann avait-il donc placé la barre si haut ? D’emblée, Le Gall emprunte un mode narratif classique, dans le respect de la série, logiquement cadré sur un lieu et une période de prédilection (le quartier du Marais, où il a vécu, et le XIXe siècle). On retrouve avec plaisir nos héros se frottant à un sujet piquant : malgré 48 aventures, c’est la première fois qu’ils se projettent dans le temps. Si le synopsis parait sympathique, le déroulé de l’intrigue n’emballe pas pleinement. Tout d’abord, les protagonistes échangent de nombreux dialogues souvent dispensables (notamment un catalogue d’expressions argotiques de l’époque qui finit par agacer). En outre, les rebondissements paraissent trop souvent « faciles » : un champignon énergétique providentiel, un gamin génial qui répare la machine en trois coups de tournevis, l’improbable alerte donnée par Spip… Enfin, une sensation de claustrophobie émane de l’ensemble de l’aventure : les héros sont constamment en huis-clos, dans le château, la cave sous l’obélisque, la grotte, et les rares séquences extérieures se font la nuit ou sous la pluie. Tout cela manque d’exotisme. D’un point de vue graphique, le Gall rend tout de même largement hommage à la série, avec un découpage, des cadrages et un coup de crayon exemplaires. Il le fait à sa manière, sur un dessin plus calme, moins « excité » que celui de Franquin, une sorte de ligne claire (même si l’auteur d’en défend) très lisible, digne de son maître, Hergé. Ses personnages sont stylistiquement ceux des débuts, plus proche du Sorcier à Champignac que de ceux de Tome et Janry. Spip et Fantasio retrouvent même carrément leurs apparences définies par Jigé (prédécesseur de Franquin sur la série). Si Spirou est un peu transparent, globalement les caractères des autres personnages sont respectés, avec au premier chef, l’ambivalence de Zorglub, mégalomane en puissance. On attend avec impatience le 3e essai, par Yann et Fabrice Tarrin, annoncé pour octobre 2007…