L'histoire :
1923 en Caroline du Nord, près de Fayetteville. Billy s'ennuie dans la cour de la ferme. Il surprend une altercation dans la grange du vieux Baker qui s'engueule avec son beau-frère pour une histoire de terres. Baker finit par le tuer sous les yeux de Billy, qui se fait attraper avant d'avoir pu fuir. Pour être sur de son silence, Baker lui broie la main à coups de masse. Sept ans plus tard, devant la rudesse d'un climat trop aride interdisant de bonnes récoltes, sa famille décide de rejoindre le convoi de fermiers qui migre vers l'ouest. Au moment du départ, la tension est à son comble entre les différents habitants bien rugueux, qui forment cette caravane de la dernière chance. Les vieilles histoires remontent à la surface et les vieux démons sont de mise. Les dettes doivent se payer et vite ! D'ailleurs, au moment du départ, Baker manque à l'appel, alors qu'il s'était publiquement fait menacer par le Canadien, un autre habitant obscur de ce village en partance. De son côté, Milton, l'aîné un peu simplet, a fait un rêve de vengeance au sujet de ce voisin cruel et violent. Billy lui rappelle que ce serait trop beau, et que dans leur vie, les rêves ne se réalisent jamais. Ils ne doivent pas l'oublier.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Sylvain Ricard associé à Frédéric Féjard nous livrent ici un scénario très noir, des dialogues taillés à la serpe entre tous ces personnages marqués au fer rouge par la lourdeur d'une vie de labeur. Le dessinateur Maël donne vie à cette ribambelle de cul-terreux mus par une violence innée. Et à la faveur d'un monochrome couleur western, il traduit merveilleusement la noirceur de ce cauchemar poussiéreux. Les gueules cassées que l'on rencontre sur la route de l'ouest sont à la mesure des souffrances que leur inflige une vie rude, qui ne ménage pas ses efforts pour leur gâcher la leur. Le trait nerveux sans rondeur, dessinant l'aquarelle de fond, est tout à fait en phase avec le récit. Une histoire implacable de vies brisées se met en place dès le commencement, où les morts s'enchaînent jusqu'au dénouement implacable, lui aussi. Apothéose de noirceur réaliste, cette œuvre est particulièrement mature. La crasse réalité sociale d'un monde où les castes nanties régissent autoritairement les vies des moins riches, y est décrite sans concession. Cependant l'atmosphère est baigné d'un indéniable souffle poétique où, sans espoirs de salut, la vie prend la couleur terne de la poussière du désert. Le lecteur est happé par la tempête qui gronde silencieusement. Le bonus de fin, avec des esquisses et un entretien à six mains, vient coiffer telle une cerise rouge sang, ce savoureux gâteau à la crème de déprime sociale.
