L'histoire :
Toinou se souvient… Tout jeune homme, lassé des âpretés de l’Aubrac, il quitte son buron pour rejoindre Paris à la fin de l’été. Direction Pigalle et le troquet du cousin bougnat de la rue Lepic, Alric. Comme premier boulot, il doit livrer du charbon à la Lune Bleue, un cabaret de Pigalle. Le videur, un mastard surnommé Poing Barre, est aboyeur, veilleur, homme à tout faire… Il se prend d’affection pour le jeune provincial et lui fait faire le tour du propriétaire. Il lui présente le beau Beb, le patron, ainsi que Pare-Brise, le comptable. Toinou revient le soir pour approvisionner le cabaret avec l’alcool d'Alric. Il fait la connaissance de la jolie ouvreuse, mademoiselle Mireille, de la magnifique stripteaseuse, Rita, et du barman, Sam, un ancien GI resté en France après la guerre. Peu à peu, le beau Beb fait travailler Toinou, qui fait partie de la famille. Il se rapproche de la jolie Mireille et va bientôt faire la connaissance des autres activités de Beb, en lien avec des bandits corses. Sa vie bascule alors…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le lecteur est tout de suite happé par la beauté de la couverture : un homme d’âge mur, en haut d’escaliers, avec le Sacré Cœur de Montmartre en fond. Une merveille en clair obscur, signée Jean-Michel Arroyo. Trompe l’œil. Parce que si les paysages et les décors d’Arroyo sont beaux, son Paris n’est pas le héros de l’album. La raison ? L’importance et l’attention données aux personnages. Précis, mobiles, expressifs, vivants, les personnages de ce Pigalle 1950 sont criants de vérité. Arroyo livre une partition exceptionnelle, au service du thème de Christin. Car dans ce Pigalle 1950, le créateur de Valérian ne nous livre pas une carte postale d’époque, mais une vraie histoire noire, avec des personnages attachants et très élaborés. Le scénario se déroule sans accrocs. Christin lui ayant livré le scénario sans découpage, Arroyo s’est créé un séquençage nerveux sur mesure, qui lui permet notamment de livrer des gros plans tendus sur des personnages hauts en couleur. Façon de parler, puisque tout est en noir et blanc, en couleur directe au lavis. A la demande de Pierre Christin, Jean-Michel Arroyo s’est inspiré des travaux d’un illustrateur hyperréaliste de faits-divers des années 50, Di Marco, quand lui-même a essayé de revenir au langage des maîtres Simenon ou Blondin. Un grand beau livre, qui appelle une nouvelle collaboration sur un tout autre registre, puisque L’Île des Riches, un huis-clos post-apocalyptique, en couleur, est sur les rails… A plus de 80 ans, Pierre Christin est toujours vert, qu’on se le dise !