L'histoire :
Nichée dans un écrin de verdure isolé, la Fondation pour l'étude des systèmes complexes et dynamiques a l'habitude d'accueillir des chercheurs de haut-vol, vingt-quatre en tout, pour leur permettre, grâce à des moyens financiers et matériels exceptionnels, de faire aboutir leurs travaux dans un cadre top-secret. Un soir, trois chercheurs (Louise, Stéphane et Vilhem) découvrent la présence d'un quatrième chercheur dans leur immeuble sans pouvoir le trouver. Or, ce fameux résident est véritablement introuvable. Fantomatique, sa théorie sur le problème « P=NP » ne l'est en revanche pas du tout. Mieux, elle pourrait révolutionner les mathématiques modernes ! C'est décidé, les trois savants vont tenter de mettre la main dessus, histoire de résoudre ce problème de la théorie de complexité algorithmique... Sans oublier le présupposé de départ : la Fondation est, quoi qu'il arrive, déjà vouée à disparaître...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On avait repéré la patte graphique et narrative de Robin Cousin dans la BD Afghanistan. L'auteur revient ici avec un one-shot malin et décalé, sorte de polar scientifique nageant dans une ambiance façon Agatha Christie. Cousin pose le décor, sombre et inquiétant : un parc scientifique high-tech regroupant les plus grands savants, isolé du monde et à proximité d'une forêt. Cette scène va devenir le petit théâtre d'un huis-clos dangereux et fatal pour ses figurants, tous en quête de la théorie révolutionnaire. Mais les décès s’enchaînent et le chercheur fantôme est introuvable. Le cœur du problème : une équation à démontrer. Même si l'on sait déjà que l'histoire finira mal, tout l'intérêt est de savoir comment. Avec un ton léger en apparence, Cousin parvient habilement à créer une atmosphère de fin de monde portée par un soupçon d'étrangeté, tout en maintenant sans relâche une tension palpable et prenante. Par son sujet décalé, sa façon didactique et rigoureuse d'en présenter les enjeux scientifiques (inutile d'être un crac en maths, tout est limpide dans cette BD !), sans oublier une insolite galerie de personnages, en mêlant le tout à une intrigue digne d'un bon thriller, Le chercheur fantôme maintient l'intérêt sans difficulté. Graphiquement, le visuel joue sur le décalage entre des personnages rondelets faussement naïfs, aux allures de figurines sans émotion, et la gravité et le sérieux de l'intrigue. Si le final déçoit un peu après avoir suscité tant d'attentes, l'ensemble reste néanmoins de très bonne tenue. Un bon scénar, un sujet malin et une belle maîtrise narrative. Du coup, voilà une BD qui ne devrait pas passer inaperçue, tout comme son auteur, à la personnalité déjà affirmée.