L'histoire :
Le joueur de foot Ousmane Traore fait un petit retour aux sources dans un village typique africain. Tandis que le groupe de touristes qui l’accompagne, assiste à une danse folklorique traditionnelle, lui s’intéresse aux dribles talentueux d’un ado vraiment doué, Slimane. La star lui fait miroiter une carrière en France… et il repart, l’abandonnant avec des étoiles plein les yeux. Il n’en faut pas plus à Slimane pour entreprendre clandestinement le voyage, quelques jours plus tard, dans la soute à bagage glacée d’un avion de ligne. A l’arrivée, il manque de peu de se faire choper par les flics, mais il parvient à disparaître dans la nature. Au même moment, Zinédine, un jeune caïd, sort de taule, de la haine plein les tripes. Sa première démarche est de contacter Fabio, un vieux truand retraité, « old school » mais réputé pour sa science de la planification, pour lui proposer un coup lucratif : le braquage d’un blindé, le jour précis où il contient un magot exceptionnel. Son deuxième job est de coller une balle dans le crâne de « son frère », en plein repas de « famille », en remerciement de ses 3 années de taule. Les points sont désormais remis sur les i. De son côté, le vieux Fabio avait fait mine de réfléchir à la proposition de Zinedine. Mais au fond de lui, il avait déjà accepté, avec une forte jouissance intérieure, et il commence à en mettre au point le programme. Bien évidemment, il ne va pas rempiler sans son beauf Paul et son vieux pote Gaby, ancien spécialiste en explosifs, ancien de l’Algérie, aujourd’hui pompiste et maire d’une petite commune…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il y a d’une part le parcours cahotant du jeune immigré clandestin, qui quitte l’Afrique pour devenir star du foot ; celui du caïd sortant de taule qui a la violence et le braquage dans le sang ; celui du trio de papys truands qui jubile à l’idée de se refaire un petit coup comme jadis, juste pour le plaisir. Baru pose ainsi plusieurs séquences initialement détachées, mai toutes immédiatement prenantes, qui se tissent rapidement entre elles en une trame unique réjouissante. Le tout forme un polar déjanté en 124 planches, une confrontation truculente entre la vieille école des truands, appartenant l’aristocratie de la pègre version Tontons flingueurs, et une petite frappe sans foi ni loi d’aujourd’hui. Les premiers se régalent en soignant la manière, le second est obnubilé par un encaissement rapide et optimal. L’album est certes moins « engagé » que nombre des précédentes œuvres de l’auteur. Néanmoins le périple du sans-papier, innocent qui se retrouve au milieu d’une affaire qui le dépasse, comme un chien dans un jeu de quilles, permet tout de même à Baru d’assouvir sa conscience sociale, ponctué d’un dénouement plutôt heureux. Baru accorde beaucoup d’empathie à ce personnage, ainsi qu’au trio de papys truands, attachants par leur manière de prendre la vie qui leur reste. La dernière couche de l’humour découle du cadre provincial pittoresque, dont se moque tendrement Baru : le club de foot local, la pompe à essence, la fanfare, la réunion d’anciens combattants, la « caisse à Bruno » customisée en boîte de nuit… Qu’elle soit visuelle ou dialoguée, la narration est hyper efficace et subtile, et son dessin semi-réaliste va naturellement à l’essentiel sans oublier les détails. On reconnaît là tout le talent de Baru, qui a d’ailleurs été choisi pour être le prochain président du festival d’Angoulême (fin janvier 2011).
