L'histoire :
Gynécologue de profession, François Renard éduque seul sa fille Camille, depuis que sa femme a foutu le camp. Ce jour là, en se rendant à son cabinet, il découvre dans son bureau une de ses ex qui a forcé le barrage de la secrétaire. Légèrement directive, Myriam lui « demande » un service : qu’il l’accompagne à une soirée organisée par une agence spécialisée dans les speed-dating (mises en contact express entre célibataires). Bon gré mal gré, François l’accompagne, essentiellement pour de se divertir. Au Love club, se trouve également Jacky, un blaireau total, chômeur zonard et amateurs de chiens, qui part déjà bredouille. Seule une jeune femme, Ilona, intéresse vaguement François. Cette dernière lui propose le petit jeu du « Jusqu’où serais-tu prêt à aller par amour ? ». Le lendemain, elle l’appelle sur son portable et lui demande par exemple de se désaper, en slip, en pleine ville. Amusé par le côté provoc, François s’exécute. Au même moment, Jacky tape un scandale à l’agence : le seul numéro qu’il a chopé est celui d’une maison de retraite… Il repart en piquant une fiche au hasard : celle d’Ilona. Ilona se met alors à pratiquer son « jeu » sulfureux avec Jacky et François, les orientant peu à peu vers un objectif précis…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A l’instar de ses collaborations avec Anne Sibran (Là-bas, Ma vie en l’air) ou du diptyque Le peuple des endormis (avec Frédéric Richaud), Didier Tronchet se donne de plus en plus de libertés en marge de ses antis héros cultes et géniaux (Raymond Calbuth et Jean-Claude Tergal). Empruntant la forme d’un bon gros one-shot de 120 planches, cette Gueule du loup s’avale d’une traite. On se laisse en effet volontiers absorber par l’aventure d’un trio de personnages sympatoches. Certes, on retrouve d’emblée l’humour inhérent à Tronchet (surtout via le personnage de Jacky), seul auteur capable de mettre en scène un héros gynéco… Puis on constate que l’auteur nous emmène bien loin de ses sentiers habituels, notamment dès l’apparition du personnage ambiguë d’Ilona. On évolue alors du côté de la comédie de mœurs, du thriller rural et de la chronique sociale… Eh oui, tout ça à la fois, en un album complet, palpitant et superbement équilibré. Cette histoire surprend sans arrêt, tout en demeurant tout du long d’une belle cohérence ! De son propre aveu, Tronchet étend son champ narratif à d’autres univers, trouvant plus que jamais « de la dérision dans le tragique, du rire dans l’horreur, du sourire mais avec les dents qui grincent ». Le dessin (colorisé par Hubert l’expert) reste quant à lui fidèle au style propre à Tronchet (et à nul autre) : un trait épais et rapide, grossier en apparence, mais parfaitement lisible. Cette esthétique a ses détracteurs, mais elle demeure d’une grande homogénéité. Savoureux !
