L'histoire :
Quand il était enfant, Paolo a appris tous les pièges de la lagune de Venise avec son père Gabriele, officiellement marin pêcheur. Ce père était souvent absent et l’abandonnait, parfois de longues heures, seul. Tout comme aujourd’hui, alors que Paolo est adolescent et que son père n’est pas rentré de la nuit, contrairement à ce qu’il avait promis. Paolo sait que son père trafique pour la mafia. Il s’inquiète logiquement. Il fait le tour des amis pour demander s’ils l’ont vu… mais personne ne l’a vu. Il passe voir son pote Ahmad, d’origine tunisienne, qui tient une laverie, et qui veut qu’on l’appelle désormais Federico. Ahmad bouscule une fois de plus une jeune immigrée, Shaza, qui est encore arrivée en retard. Ensemble, ils rejoignent deux potes, avec lesquels ils tentent de monter un deal d’extasy. Ils boivent des bières sur la plage, autour d’un feu de camp (on est en plein hiver !). Ils imaginent ce qu’ils vont faire de leur pognon, ils font les cons avec leur hors-bord. Le soir venu, Paolo rentre chez lui. Toujours pas trace de son père. Le lendemain, il rend visite à son grand-père, un ancien mafieux qui a pris perpét’, en fauteuil roulant et en prison. Puis il retrouve ses potes pour aller prendre livraison de leurs sachets de pilules roses. Hélas, un mauvais tour les attend…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Venise en hiver, Venise du côté des quartiers pourris, Venise en proie à des flots massifs de migrants à faire passer. Ha ça vous change de la carte postale touristique ! Le scénariste Christophe Dabitch nous immerge sans ménagement aux côtés de la jeunesse italienne désœuvrée et dans la Venise des bas-fonds. Adolescent, le jeune héros Paolo est promis à un avenir de mafieux : son grand-père finit ses jours en taule, son père œuvre pour un parrain dont une partie du business repose sur le passage de clandestins et la confection de faux papiers… et lui-même est en train de se lancer dans un trafic d’extasy. Son père a disparu, il est abandonné à lui-même, son avenir semble tout tracé. Et en plus, il fait froid et il fait moche. C’est la joie ! Cet épais one-shot sur fond de récit initiatique se situe entre le thriller mafieux et la chronique sociale désabusée. Il offre au dessinateur Piero Macola, d’origine italienne mais habitant désormais à Paris, l’occasion de dessiner à l’aquarelle de magnifiques et sordides paysages de la lagune vénitienne, qu’on ne voit pas lorsqu’on reste dans les circuits touristiques. Le ton est âcre, l’ambiance crépusculaire et ce jeune homme très attachant de par son instinct de survie. Paolo semble avoir appris à éviter bien plus que les pièges de la lagune.