L'histoire :
Un renard et un ours se promènent de par les taillis et les chemins, en quête d’une région grasse et confortable. Des champs bien alignés et des clôtures entretenues leur indiquent que le territoire est occupé par un fermier. Or qui dit fermier dit… basse-cours ! Renard se pourlèche déjà les babines. La nuit venue, il fait un premier raid en solo dans l’enceinte de la ferme. Hélas, le fermier est plus futé que lui (son chien, surtout !). Renard est rapidement assommé et enchaîné. Le fermier le destine à devenir une offrande en faveur du seigneur local, le terrible ogre de Barback. Et ça ne manque pas : dès le lendemain, Renard est convoyé par moult éleveurs locaux en compagnie de veaux, vaches, cochons, pour garnir le garde-manger du château de l’ogre. Or, lorsque l’ogre apprend qu’il y a un renard dans la livraison du jour, il le fait curieusement mander devant lui. Une boule d’angoisse, Renard se présente donc devant l’ogre attablé, en train de dévorer. L’ogre est étrangement courtois : il l’invite à partager un poulet. Mais si Barback soigne ainsi Renard, c’est parce qu’il sait qu’un renard, c’est futé. Or l’ogre a besoin d’un ami futé, pour l’aider à discerner les choses dans la nouvelle mission qu’il s’est fixé : trouver l’amour et se marier.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ça devrait commencer par « Il était une fois »… car cette savoureuse histoire concoctée par Nicolas Dumontheuil est ni plus ni moins qu’un conte original, aux allures burlesques, mais truffé de petits enseignements et de clins d’œil cyniques à nos réflexes sociaux. Nous suivrons ici majoritairement deux personnages principaux, antagonistes et complémentaires : l’ogre et le renard. Leur duo fonctionne comme s’il s’agissait d’un roi absolu (mais simplet) et de son bouffon soumis (mais malin). D’un côté, l’ogre de Barback (un hommage au groupe de zicmu ?) est un vrai ogre, capable de tout dévorer, et à longueur de journée. Tyrannique, capricieux, affamé (forcément), son physique est vaguement inspiré de Gargamel (dans les Schtroumpfs !). Le Renard obéit quant à lui à un destin qu’il ne maîtrise pas : il a de la chance d’être un peu futé et d’entrer en empathie avec le monstre, qui a trop besoin de lui pour le manger. Ensemble, ils cherchent évidemment un truc en contre-emploi total avec leur condition : marier l’ogre. Compte-tenu que l’amour n’entre que peu en jeu dans cet objectif, son cheminement est foncièrement idiot, absurde et permet moult situations et dialogues jouissifs, au gré des rencontres et des aléas de leur expédition. Accompagné d’un dessin presque enfantin, de personnages caricaturaux (ha ! quand l’ogre dévore !), de décors détaillés et très colorés, l’exercice est complet et franchement réjouissant. Dumontheuil s’amuse avec les codes littéraires, en faisant des clins d’œil au 9ème art (il y a comme des morceaux de Sylvain et Sylvette et même de Lucky Luke !), un peu comme l’a fait en son temps le film d’animation Shrek, et c’est un pur bonheur.